Un projet du Programme de Recherches La Bible en ses traditions AISBL
Dirigé par l’École Biblique et Archéologique Française de Jérusalem
Pour nous apporter votre aide, cliquer ici
13 Quand j’étais encore jeune
avant que j'erre j’ai recherché ouvertement la sagesse dans ma prière.
13 Tu as élevé ma demeure sur la terre
et j'ai prié pour que la mort s'éloigne.
13 ...
14 Devant le temple je l'ai demandée
et je la rechercherai jusqu’à la fin.
14 J’ai invoqué le Seigneur, père de mon Seigneur, pour qu’il ne m'abandonne pas au jour de ma tribulation
et qu'il ne me laisse pas sans secours au temps des orgueilleux.
14 ...
15 Dans sa fleur comme une grappe qui commence à mûrir
mon cœur s'est réjoui en elle.
Mon pied a marché dans le droit chemin
dès ma jeunesse je l'ai suivie.
15 Je louerai sans cesse ton nom
et je le glorifierai dans mon action de grâce :
ma prière a été exaucée !
15 ...
16 J'ai incliné un peu mon oreille et je l’ai reçue
et j’ai trouvé pour moi une grande instruction.
16 Tu m’as délivré de la perdition
et tu m’as arraché au temps injuste.
16 ...
17 Grâce à elle j’ai retiré un grand profit ;
à celui qui m’a donné la sagesse je rendrai gloire
17 C’est pourquoi je te rendrai grâce et je chanterai ta louange
et je bénirai le nom du Seigneur.
17 ...
18 car je me suis résolu à la pratiquer
je me suis appliqué au bien et je ne serai pas confondu.
18 Lorsque j’étais encore jeune
avant de m’égarer j’ai recherché la sagesse ouvertement dans ma prière.
18 ...
19 Mon âme a lutté pour elle
et j’ai été attentif dans l'accomplissement de la loi
mes mains je les ai levées en haut
et j’ai déploré de l’avoir ignorée.
19 Avant le temps je l’ai demandée
et je la rechercherai jusqu’à la fin ;
elle perdra sa fleur comme un raisin précoce.
19 ...
20 J’ai dirigé mon âme vers elle
et dans la purification je l’ai trouvée ;
j'ai acquis l'intelligence avec elle dès le commencement
c’est pourquoi je ne serai pas abandonné.
20 Mon cœur s'est réjoui en elle
mon pied a marché sur le droit chemin :
depuis ma jeunesse, je me suis efforcé de la suivre.
20 ...
21 Et mes entrailles se sont émues à sa recherche
c'est pourquoi j'ai acquis un bien précieux.
21 J’ai incliné un peu mon oreille et je l'ai recueillie.
21 ...
22 Le Seigneur m’a donné la parole pour ma récompense
et par elle je le louerai.
22 J’ai trouvé en moi-même beaucoup de sagesse
j’ai beaucoup progressé en elle.
22 ...
23 Approchez-vous de moi ignorants
et demeurez dans la maison de l’instruction.
23 À celui qui m'a donné la sagesse je rendrai gloire
23 ...
24 Pourquoi dites-vous en être privés ?
et vos âmes n'ont-elles pas grandement soif ?
24 car je me suis résolu à la pratiquer
je suis zélé pour le bien et je ne suis pas confondu.
24 ...
25 J’ai ouvert ma bouche et j'ai parlé.
Procurez-vous-la sans argent
25 Mon âme a lutté pour elle
et je me suis affermi en la pratiquant.
25 ...
26 pliez votre cou sous le joug
et que votre âme reçoive l’instruction
elle n'est pas loin à trouver.
26 J’ai élevé les mains en haut
et j’ai déploré mon ignorance d'elle.
26 ...
27 Voyez de vos yeux que j’ai peu travaillé
et que j’ai trouvé pour moi-même un grand repos.
27 J’ai dirigé mon âme vers elle
et je l’ai trouvée dans la connaissance :
27 ...
28 Prenez part à l’instruction à grand prix d’argent
et vous acquerrez beaucoup d’or en elle.
28 j’ai possédé mon cœur avec elles depuis le début
c’est pourquoi je ne serai pas abandonné.
28 ...
29 Que votre âme se réjouisse de sa miséricorde
et ne rougissez pas de sa louange.
29 Mes entrailles ont été émues en la cherchant
c'est pourquoi je posséderai un excellent bien
29 ...
13–30 Confession et exhortation
En première partie, l'auteur raconte sa propre recherche de la sagesse. Son propos peut être scindé en deux sections :
Cette seconde partie invite les « gens sans instruction », ceux qui n’ont pas encore suivi cet itinéraire de sagesse, à suivre son exemple et son enseignement.
Considéré souvent comme un appendice, ce poème faisant l’éloge de la quête de la sagesse est bien dans la manière de Ben Sira.
L'auteur accumule ici des indices autobiographiques (Milieux de vie Si 51,13–30), exceptionnels dans la Bible.
13–30 Présentation générale Du point de vue de la critique textuelle, ce poème final se présente différemment du reste du livre : aucun des manuscrits n’est totalement fiable.
La version grecque, le meilleur témoin, présente plusieurs difficultés : v.15a est difficile à interpréter ; v.26c ne donne qu’un stique ; v.28a semble contredire v.25b (cf. Grammaire Si 51,28a, où la contradiction est levée).
La Vulgate suit le grec. La plupart et les meilleurs manuscrits latins ne s’achèvent pas sur Si 51 mais sur Si 52,1-13, qui reprend la prière de Salomon de 1R 8,22-31 ; 2Ch 6,12-22. V-Si 52 n’est cependant pas le texte de ces deux passages en V mais retraduit le grec.
Les témoins de l’hébreu sont problématiques :
À partir de toutes les versions il est possible de reconstituer le texte héb. original, en respectant le caractère alphabétique du poème (Genres littéraires Si 51,13–30). Néanmoins, en plusieurs versets cette reconstitution demeure conjecturale. La première partie (v.13-17 : Propositions de lecture Si 51,13–30) correspond à 11Q5 (11QPsa), en complétant le v.13b avec « (je l’ai demandée) et j’ai beaucoup prié » (Critique textuelle Si 51,13b).
La version syriaque est une traduction assez libre de l’héb. : elle ne suit pas le caractère alphabétique du poème, saute les v.14-15ab (Comparaison des versions Si 51,13–17) et modifie des pronoms.
13b je l’ai demandée (héb.) Conjecture Le stique est manifestement trop court. Proposition de lire « je l’ai demandée et j’ai beaucoup prié ».
15a De sa fleur, comme d’une grappe de raisins qui mûrit Distique difficilement compréhensible.
17a elle ne cessait de croître : 11Q5 | ms.B : son joug était
17b À qui m’enseigne (héb.) Singulier ou pluriel ? 11Q5 : mlmdy ; l’absence de vocalisation permet de comprendre un singulier (visant Dieu lui-même) ou un pluriel (« à ceux qui m’enseignent »).
17b sa gloire (héb.) Le possessif écrit avec un yod 11Q5 : hwdy ; lire hôdô (« sa gloire ») et non hôdî (« ma gloire »). 11Q5 écrit le yod le plus souvent comme un waw. Ce phénomène apparaît bien plus dans ce ms. que dans les autres mss. hébreux de Ben Sira.
18–22 (héb. reconstitution)
18a prendre plaisir (héb.) Interprétation de la racine 11Q5 : w’śḥqh ou w’šḥqh.
19c persévérais/purifiai (héb.) Conjectures 11Q5 : ṭrty ; hypothèses en présence :
19d en ses hauteurs (héb.) Lacune et hypothèses 11Q5 : brwmyh.
19d et j’ai remarqué (G) Conjecture ? G : epenoêsa ; la conjecture epenthêsa « j’ai déploré » se trouve dans le Codex Venetus (8e s.) et ms. 248 (cf. V : conluctata est).
20b ses secrets (héb.) Lecture ? Dans 11Q5 ne sont lisibles que les lettres ‘rmyh, le ‘ et le h étant en plus hypothétiques. Peut-être peut-on supposer ma‘ărūmméhā (« ses secrets ») ? (Cf. ‘ārôm « nu », ‘ārûm « rusé », « subtil ».)
23–30 (héb. reconstitution)
24a Pourquoi en manquez-vous encore (G) Variante grecque G : ti eti hustereite en toutois. Leçon préférable à ti hoti hustereisthai legete en toutois « pourquoi dites-vous que vous en manquez ? » (cf. V : quid adhuc retardatis et quid dicitis in his « Pourquoi tardez-vous encore et qu’en dites-vous » ; confusion entre dicitis et degitis).
26c C’est tout près qu’on peut la trouver (G V) Lacune ? Verset d’un seul stique ; l’original devait en comprendre deux.
28a Écoutez (S) Variante syriaque Codex ambrosien : « Écoute ».
29a conversion (S) Vorlage héb. ? Ms.B a traduit par yšybty. Le mot yᵉšîbâ étant un terme rabbinique, l’original hébreu devait comporter un autre mot, peut-être tᵉšûbâ, en suivant S : tybwt’ ? Mais le poème ne signale pas de faute dont Ben Sira aurait à se repentir. Supposer yᵉšû‘â « salut », plus proche de la « miséricorde » de G et V : « mon salut » ou « son salut » (c.-à-d. le salut de Dieu) ?
13a m’égarer (héb.) Moralement 11Q5 : t‘yty ; le verbe tā‘â signifie l’errance morale et non pas spatiale. Ni dans ce poème ni ailleurs dans le livre l’auteur n’a signalé une telle errance morale. Malgré les voyages qu’il signale, les siens (Si 34,12) ou ceux du scribe en général (Si 39,4), il semble quand même préférable de ne pas opter pour une errance spatiale.
13a mes errances (G) Moralement et spatialement G : planêthênai me. En s’inspirant probablement des voyages de Ben Sira, G emploie le verbe planaômai, qui évoque à la fois la pérégrination spatiale et l’errance morale. Ceci élargit l’idée : il conçoit les voyages comme des expériences morales (cf. Si 39,4).
19d pour les siècles des siècles (S-20d) Expression figée
20c commencement Ou « principe » pour G : archês et S : ršyt’.
21b ai-je acquis une bonne acquisition Accusatif d'objet interne G : ektêsamên agathon ktêma (cf. V : possidebo bonam possessionem), rendant l’héb. (ms.B : qnytyh qnyn ṭwb) à la suite de S (qnyth qnyn’ ṭb’), pour insister.
23b maison de l’instruction Sémitisme G : oikôᵢ paideias a respecté la construction périphrastique de l’hébreu (bét midraš ou, plus sûrement, bét mûsar : Vocabulaire Si 51,23b.
28a elle vaut beaucoup d’argent L'argent : moyen ou valeur ? G : en pollôᵢ arithmôᵢ arguriou. On peut comprendre :
14a sanctuaire (G) Thème du Temple
La version grecque du v.14a situe la prière de Ben Sira face au Temple (naos). Dans le livre de Ben Sira, ce serait la seule mention du Temple ou sanctuaire où aurait prié Ben Sira.
Le Temple est encore mentionné :
16a j’ai accueilli (G) Élision Pas de complément : probablement la sagesse, ou l'instruction mentionnée au 2e stique. L’absence de complément, que l’on rencontre dans d’autres textes bibliques, élargit le sens du verbe : « j’ai été enrichi ». Comparaison des versions Si 51,16a
20c l’intelligence (G V) Échos de l'anthropologie sémitique G : kardian et V : cor, litt. « le cœur ». En héb., le cœur (lēb) est le siège de la sagesse, du discernement, de l’intelligence. « Acquérir le cœur », c’est acquérir l’intelligence (de la sagesse). Ce sémitisme et cette anthropologie sémitique se retrouvent dans la version syriaque mais aussi dans les versions non sémitiques, grecque et latine.
20c le commencement Ambiguïté : le commencement de qui ou de quoi ? L'absence d'un possessif (« le commencement ») laisse ouvertes deux lectures. Il acquit la sagesse :
23 gens sans instruction + de l’instruction — Figure de dérivation G : apaideutoi... paideias : répétition de la même racine (seulement en G).
27 peu peiné + bien du repos — Antithèse entre les deux stiques. Comparaison des versions Si 51,27b
13–30 Poème alphabétique Le livre se conclut, comme le livre des Proverbes, par un poème alphabétique, c'est-à-dire un poème dont la première lettre de chaque verset (ou strophe selon le cas) suit l’ordre de l’alphabet. Ce procédé poétique est considéré comme recherché. On trouve d’autres poèmes alphabétiques en Ps 9-10 ; 25 ; 34 ; 37 ; 111-112 ; 119 ; 145 ; Pr 31,10-31 ; Lm 1-4 ; Na 1,2-8. Ici,
Le caractère alphabétique du poème avait déjà été détecté sur la base de G et S, avant la découverte des mss. hébreux du Caire et de Qumrân.
13–30 Traits autobiographiques exceptionnels La pointe du poème est une invitation à se mettre à l’école du maître, ce qui n'est pas sans parallèles : Intertextualité biblique Si 51,23–28. Il est remarquable ici que pour justifier cette invitation, les deux premières strophes soient une auto-présentation de celui qui parle. Ben Sira parle souvent de lui-même dans son livre :
Aucun sage de la Bible avant lui n’avait agi de la sorte.
13–17 Abrègement dans ms.B et S La 1e partie de la confession (Propositions de lecture Si 51,13–30) est réduite d’un tiers dans ms.B et S :
13b la sagesse dans ma prière : G V | héb. S : Ø — Explicitations dans G et V
14a Elle est venue (héb.) Particularité héb. C’est la seule version à mentionner la venue de la sagesse.
15c mon Seigneur (S-15a) Ou « Seigneur » La mention de Dieu au vocatif dans S est absente de G, V et 11Q5. Elle est toutefois reprise par le ms.B (’dny).
16a j’ai accueilli : G | V : je l'ai accueillie V : excepi illam supplée le complément : illam = sapientiam « la sagesse ». Procédés littéraires Si 51,16a
18a mettre en pratique : G V | S : faire le bien | héb. : prendre plaisir G et V insistent sur la mise en pratique, aussi bien de la sagesse (v.17b) que de la Loi (v.19b).
19ss (S-20-21) Allusion à Dieu S parle de « lui » et « le », c’est-à-dire de Dieu. Le phénomène est-il lié à l’introduction de « mon Seigneur » au v.15 ? S est la seule à le faire, et ms.B ne l’a pas suivie.
19cd G V | héb. Le caractère alphabétique du poème en 11Q5 indique que G et V ont interverti les deux stiques.
20d ne serai-je pas abandonné : G V | S : je ne l’abandonnerai pas G et V soulignent l’idée de la récompense des efforts, alors que S prolonge le développement autour de l’idée de persévérance depuis le début jusqu’à la fin.
22a m'a donné pour salaire une langue : G V | S : a donné à ma langue une récompense Dans G et V la langue est le salaire ; en S la langue a une récompense.
25b la sagesse : S | G V : Ø Curieusement G et V ne précisent pas l’objet de l’acquisition, mais ils ont déjà mentionné la sagesse avant (v.13b.17b et V-22b). Comparaison des versions Si 51,13b
27b bien du repos : G V | S : beaucoup d'elle
13b dans ma prière Topos biblique de la prière pour obtenir la sagesse, p. ex. le jeune Salomon (1R 3,9 ; Sg 8,21).
17a Un progrès m’est advenu Croissance de la sagesse Si 24,13-14.
18a prendre plaisir avec elle (héb.) Écho de Pr ? Selon Pr 8,30-31, la Sagesse jouait (même verbe śḥq), se plaisait avec Dieu comme avec les hommes.
23–28 Invitations de/à la Sagesse Deux poèmes peuvent être rapprochés de celui-ci : Pr 8,4-36 et surtout Si 24,3-22 font parler la Sagesse qui, pour inviter ses auditeurs à se mettre à son écoute, se présente elle-même.
26a joug
Alors que l’AT (surtout les prophètes) présente le plus souvent le joug comme un signe négatif d’asservissement dont le Seigneur délivre (Is 10,27 ; 58,6 ; Jr 27,2 ; 28,14 ; 30,8 ; Os 10,11 ; Na 1,13), Ben Sira présente le joug de la sagesse du Seigneur comme positif (cf. Si 6,30 ; déjà So 3,9 « servir sous un même joug »).
En Mt 11,29 (« Chargez-vous de mon joug et mettez-vous à mon école »), Jésus se présente en maître de sagesse. En Ac 15,10, le joug de la Loi (expression rabbinique) est présenté comme trop lourd.
13–30 et 11Q5 : Une composition énigmatique On s’interroge sur la fonction que pouvait remplir le florilège d’extraits de psaumes et de ce poème alphabétique découvert à Qumrân.
12–20 Lectionnaire quotidien romain : la joie dans la sagesse
13–19a.20.27 Lectionnaire sanctoral romain
13–30 Deux œuvres appelées l’Alphabet de Ben Sira La première œuvre appelée Alphabet de Ben Sira est un opuscule qui se compose d’une liste de 22 sentences en araméen, rangées selon l’ordre alphabétique et agrémentées d’un commentaire en hébreu. Listes de sentences (au plus tôt fin de la période des amoraïm ou même la période des gaonim) et commentaire (11e s. ?) ne relèvent pas de la même composition. Il ne semble pas que l’origine de l’opuscule soit liée au poème alphabétique qui clôt le livre de Ben Sira. Il n’est même pas certain que les auteurs de ce pseudépigraphe aient lu l’œuvre de Ben Sira, même si l’on peut trouver une communauté d’esprit entre le livre et la liste. En revanche, cet Alphabet de Ben Sira atteste que la tradition juive attribuait à Ben Sira une série de sentences qui lui étaient plus ou moins étrangères, comme le montre également le Talmud de Babylone (→b. Sanh. 100b). Le commentateur de la liste alphabétique des sentences attribue à Ben Sira la paternité de cinq livres, dont la →Pesiq. Rab.
Le second Alphabet de Ben Sira (liste alphabétique de 22 sentences en hébreu et commentaire), postérieur au premier, rapporte une série de légendes relatives à Jésus Ben Sira, dont le récit de la naissance virginale, dans une sorte de parodie de la naissance d’un autre Jésus, de Nazareth.
26a Mettez votre cou sous le joug de la Tora
1–30 Le premier commentaire chrétien sur le livre de Ben Sira est le commentaire édifiant de , évêque de Mayence au 9e s. (→Comm. Eccl.).
17b En me procurant la sagesse je rendrai gloire (V-23) Citations
22 La Pentecôte
23b la maison de l’instruction Interprétation ecclésiologique
25 Interprétation intertextuelle : l'Eucharistie
26a Mettez votre cou sous le joug
27s Disproportion entre effort terrestre et récompense céleste