Un projet du Programme de Recherches La Bible en ses traditions AISBL
Dirigé par l’École Biblique et Archéologique Française de Jérusalem
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1 VICI COMMENCE LE LIVRE DES PSAUMES ÉMENDÉ SELON LA SEPTANTE
Heureux l'homme qui ne va pas au
Vne partit pas pour le conseil des impies
qui ne se tient pas dans la voie des pécheurs
Vni dans la voie des pécheurs ne se tint
et qui ne s’assied pas dans la compagnie des moqueurs,
Vni sur la chaire de la peste ne s'assit
1 ...
2 mais qui a son plaisir dans la loi de Yhwh
et qui la médite jour et nuit.
2 ...
2 mais dans la Loi du Seigneur est sa volonté,
dans sa Loi il méditera jour et nuit !
3 Il est comme un arbre planté près des cours d'eaux
qui donne son fruit en son temps
et dont le feuillage ne se flétrit pas :
tout ce qu’il fait réussit.
3 ...
3 Il sera comme le bois
qu'on a planté près d'un cours d'eau
qui portera son fruit en son temps
et sa feuille ne pendille pas.
4 Il n’en est pas ainsi des impies
ils sont comme la paille que le vent emporte.
4 ...
4 Ils ne seront pas comme ça, les impies ÷pas comme ça:
mais comme la poussière que projette le vent ÷à la face de la terre:
5 Ainsi
SCar ceci : les méchants ne se relèveront pas au jugement
ni les pécheurs au rassemblement
Sà l'assemblée des justes
5 C’est pourquoi les impies ne se relèveront pas au jugement
ni les pécheurs au conseil des justes
5 ainsi les impies ne ressusciteront pas au jugement
ni les pécheurs au conseil des justes
6 car YHWH connaît
Vpuisque le Seigneur a reconnu la voie des justes
et le chemin pécheurs mène à la ruine.
Vla route des impies s'en est allée.
6 ...
3a arbre De l’arbre de vie à l’arbre de la croix
Selon son sens premier en hébreu ‘ēç signifie « bois », matière de l’arbre. De même xulon en grec et lignum en latin. Mais tandis que ‘ēç est pratiquement le seul substantif pour désigner un arbre, le grec et le latin ont en plus un terme plus spécifique, respectivement dendron (30 fois AT, 25 fois NT) et arbor (38 fois AT, 31 fois NT).
Concentrons-nous sur l'expression « arbre de vie », une spécification que la tradition juive et chrétienne s'est permise dans la relecture du v.3a. Comparaison des versions Ps 1,3a ; Tradition chrétienne Ps 1,3a
Les quatre occurrences de xulon zôês se trouvent toutes dans l'Apocalypse, en lien avec l'image du paradis et de la Jérusalem céleste (Ap 2,7 ; 22,2.14.19). Au volet tragique des temps primordiaux (Urzeit ; cf. Gn 2,9 ; 3,22.24) correspond par antithèse le volet radieux de l'au-delà du temps (Endzeit) où le drame initial est définitivement dénoué.
De l'arbre de vie du mythe primordial au bois/arbre (xulon) de la croix du drame évangélique, il n'y a qu'un pas, vite franchi dans l'interprétation chrétienne de notre psaume (Tradition chrétienne Ps 1,3a). Cette transposition théologique devenait obvie à la lumière de quelques textes de l'AT qui parlent de pendaison sur un bois (kremannumi epi xulou ; Gn 40,19 ; Dt 21,22-23 ; Jos 8,24 ; 10,26 ; Est 5,14 ; 6,4 ; 7,10 ; 8,7 ; voire →1 Esd. 6,31). Trois textes du NT reprennent telle quelle l'expression verbale pour l'appliquer à la crucifixion de Jésus (Ac 5,30 ; 10,39 ; Ga 3,13). Tout cela permet de tisser des relations intertextuelles associant l’arbre de vie symbolique à l’arbre réel de la croix.
4 ÷pas comme ça: + « ÷à la face de la terre: » Bible latine : obèles (et astérisques) On appelle « obèle » le petit signe ÷ . Il a une grande importance dans l'histoire de la constitution et de la transmission des bibles que nous lisons aujourd'hui. En transmettant la bible latine (→Recensions), en effet, →Origène ou saint Jérôme ne voulurent pas livrer un texte prêt-à-lire. Ils choisirent de montrer les « coutures » de la Bible en cours d'élaboration, pour inviter les lecteurs à accueillir le texte sacré dans toute son effervescente interactivité.
Outre la division même du texte en →cola et commata et les →titres et didascalies qu’il interpole dans certains livres, Jérôme souligne cette effervescence du texte biblique d'une version à l'autre, par des signes typographiques devenus fameux : les « astérisques » et « obèles ».
Dans l’érudition alexandrine, ces signes furent d'abord utilisés pour l'édition critique des textes grecs. Ils revêtirent ensuite des formes et des fonctions diverses dans les papyri littéraires grecs et latins en Égypte, aux époques romaine et byzantine.
L’astérisque est l’un des sept signes critiques utilisés par
(ca 216-145) pour éditer Homère. Placé dans la marge, il signale un vers authentique incorrectement inséré ailleurs dans l’œuvre d’Homère. Les astérisques de ce papyrus illustrent cet usage : les vers 490-493 du chant z de l’Iliade y apparaisent placés à tort dans les chants α et θ de l’Odyssée. Sur le papyrus, manque le quatrième astérisque (pour Z 493).Quand il embrasse l'idéal d'une veritas hebraica à partir de 390, Jérôme s’inspire d’Origène :
Origène lui-même s’en expliquait ainsi :
Pour Jérôme comme pour Origène, ces signes sont d’abord les instruments de la recherche d'une plus grande proximité avec le texte hébraïque dont ils disposent :
L' astérisque ※ signale un passage oublié par la version grecque courante, mais qui existe dans l’hébreu et les autres versions.
L'obèle ÷ signale un passage ajouté dans la version grecque, mais qui n’apparaît pas dans l'hébreu.
Quand c’est un verset, un colon ou un comma entiers qui sont concernés, l’astérisque ou l’obèle est simplement placé au début de la ligne ; lorsque le manque ou l’ajout concerne seulement un mot ou un groupe de mots, Jérôme marque la fin de ce groupe par les deux points : « : ». Cela peut prêter à confusion en langue française, où ce signe de ponctuation existe déjà — mais l'usage des deux points est suffisamment polysémique pour qu’on puisse lui ajouter aussi cette fonction, ont déterminé les auteurs de la présente traduction.
Jérôme lui-même explique le système dans sa préface à sa révision du Psautier de la Septante :
Vers 386-389, saint Jérôme recommande à ses chères Paula et Eustochion, grandes matrones romaines devenues ses disciples, d’y être particulièrement attentives dans les livres de Salomon qu’il vient de restaurer :
On a le droit de ne pas trouver ce système très facile à comprendre. Le grand saint Augustin lui-même s’est attiré des sarcasmes de saint Jérôme à cause de ses questions « idiotes » à ce sujet. Le moine de Bethléem reproche à l’évêque d’Hippone, qui ne l’encourageait pas suffisamment dans son travail, de … « sembler ne pas comprendre sa propre question » :
Des millions d’amateurs de bande dessine connaissent ces mots par les célébrissimes héros de Goscinny. Remplacez la terminaison –isque par –ix, en hommage rimé au chef gaulois Vercingétorix, et vous obtenez « Astérix » ; faites opération semblable avec l’obèle et vous obtenez « Obélix ».
Quand on prend l’hébreu comme point de référence, dans la version grecque l’astérisque signale un moins, et l’obèle un plus. On comprend donc que leurs noms, « gallicisés », désignent respectivement un petit et un grand (non, on ne dit pas gros !) personnages.
« Obélix » vient d’abord de cet obélisque typographique, mais cela n’empêche pas de remarquer que l'imposant monument égyptien qu’on appelle obélisque aussi (il y en a un place de la Concorde), ainsi que le menhir, son avatar gaulois dont Obélix fait justement commerce, conviennent à la carrure du Gaulois roux !
Loin d’être une coïncidence, le choix de ces noms constituerait un hommage à la mémoire du grand-père de Goscinny, imprimeur-typographe. Tout comme les deux amis Astérix et Obélix, l’astérisque et l’obèle sont étroitement liés par leur usage jusqu’à aujourd’hui :
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Pour aller plus loin : Gabriel Nocchi
et Maria Chiara (dir.), Signes dans les textes, textes sur les signes, « Papyrologica Leodiensia 6 », Liège : Presses universitaires de Liège, 2017 — Frederick , Origenis Hexaplorum, Oxford : Clarendon Press, 1875, t.1, LXI-LXIII — Robert , Introduction à l'étude des manuscrits grecs, Paris : Klincksieck, 1954, 73-75.1 V—IUXTA HEBR.
4 V—IUXTA HEBR.
Il n’en est pas ainsi des impies | ils sont comme la poussière que le vent emporte.
3 Comme le bois Offertoire pour la Saint-Benoît
Offertoire chanté pour la fête de saint Benoît le 11 juillet.
1abc Heureux l'homme qui ne s'en est pas allé dans le conseil des impies (V) Inscription médiévale Le Psautier est le livre biblique le plus connu dans sa diversité dans les inscriptions du Moyen Âge occidental, avec 142 versets différents. Appris par cœur dans les écoles, récités dans la liturgie des Heures de l’office divin et les chants de l’ordinaire à la messe, les psaumes sont présents dans les matériaux durs tout autant que dans les manuscrits et les mémoires. Le Musée d’Évreux conserve une brique provenant de l’abbaye de Pénal (Eure) et portant inscrit le v.1 du Ps 1 (→CIFM 22,148) :
1–6 L'homme juste et l'arbre. L'homme juste est comparé à un arbre dans ce psaume. Cette comparaison a été diversement interprétée dans les arts visuels.
Le chêne suffit ici à traduire la vertu du roi Louis IX : le corps du monarque prolonge visuellement le tronc de l'arbre. Le peintre souligne ainsi la vertu affermie du roi, gage d'une justice droite.
L'homme juste a aussi été représenté sous la forme d'un arbre : le comparé et le comparant ne forment plus qu'un !
Le peintre Roberto Mc 8,24 et le rapprochement ne lui a pas échappé, pour un résultat saisissant :
a lu« Heureux l’Homme qui ne marche pas selon le conseil des méchants... il est comme un arbre planté à la rupture des eaux ». Ps 1 « J’aperçois les hommes, mais j’en vois comme des arbres et qui marchent » (Mc 8,24)
3 L'arbre. Un motif judéo-chrétien de portée universelle.
L'abre constitue un motif universel dans les arts visuels. Motif central ou secondaire dans les compositions artistiques, les arbres apparaissent dès les premiers versets de la Genèse (Gn 1,29). Parmi ces eux, se trouve l'arbre de vie, auquel les traditions juive et chrétienne ont rattaché l'arbre du v.3a (Comparaison des versions Ps 1,3a ; Tradition chrétienne Ps 1,3a).
L’arbre du paradis originel des Écritures, dont les fruits devaient assurer l'immortalité, peut aussi se rapprocher de l’arbre mythologique décoratif présent dans les croyances de nombreux peuples, depuis l'époque préhistorique en Mésopotamie et dans l'Antiquité, entre autres en Égypte, en Grèce, en Babylonie, en Perse et en Inde, avec des symboliques variées. Au Moyen-Orient, l’arbre de vie symbolise l’immortalité ; en Chine et en Inde, le centre de l’univers. Dans le Bouddhisme, il est nommé « le Bodhi » : Bouddha a eu l’éveil sous cet arbre, lieu de ses enseignements premiers.
Dans l'art chrétien médiéval, ces symbolismes naturels ne sont pas oubliés :
Le manuscrit Carmina Burana compile 318 chants profanes latins (quelques-uns sont en moyen-haut allemand) en 112 feuillets et contient aussi deux pièces sur la Nativité et sur la Passion. Il s'agit ici de l'une des huit illustrations apparaissant à la fin de chaque groupe de chants de thème similaire.
Jusque dans l'art islamique, il symbolise la renaissance éternelle de la nature et la fugacité de la condition humaine.
Ce pommier ombrageant des gazelles paissant tranquillement à gauche et chassées par un lion à droite, pourrait symboliser l'existence humaine oscillant entre répit et danger.
Au 20e s. encore, il inspire de grands plasticiens. L'un des plus célèbres « arbres de vie » du siècle passé est celui de Klimt :
Les trois parties du triptyque sont intitulées : L’Attente, L’Arbre de Vie et L’Accomplissement. L'œuvre achevée n'est pas publique : elle a été réalisée à fresque par l'atelier de la Wiener Werkstätte, chargé de la réalisation de la décoration du Palais Stoclet du nom du belge Adolphe Stoclet, commanditaire de Klimt.
L’arbre de vie est un sujet extrêmement ancien. On trouve deux arbres dans le Jardin d’Eden : l’Arbre de vie et l’Arbre de la Connaissance, actant principal du péché originel. L’Arbre de Klimt concentre le cycle de la vie : les feuilles d'automne et les bourgeons de printemps, l'ensemble du cosmos (oiseau et fleurs), le monde sous-terrain des racines, le monde humain du tronc et le monde céleste des branches. Il est structuré en 7 branches (symboles des caractères et humeurs humains) démultipliées en ramifications finissant en spirales (suggérant la répétition cyclique de la vie). Les deux panneaux qui l'encadrent présentent à gauche une danseuse, « L’attente » et à droite « L’accomplissement » avec un couple d’amoureux rappelant le tableau du Baiser du même artiste.
Dans le christianisme, les deux arbres du paradis, l’arbre de la connaissance du bien et du mal et l’arbre de l’immortalité, sont des types du Messie crucifié : l’arbre de la croix est le lieu où la mort est devenue le début de la vie. La typologie de la croix comme arbre culmine au 13e s. dans le traité de →. , Lignum
Dans les arts visuels, cette analogie se déploie dans le motif des « crucifix ramifiés » : la croix-Arbre de Vie devient tronc feuillu à branches, fruits et nœuds.
Le motif est à la fois protologique et eschatologique, renvoyant à la fois à la Genèse et à l'Apocalypse, à l'Éden et au Golgotha, à Ève et à Marie, à Adam et au Christ, nouvel Adam.
L'arbre de vie scinde le médaillon en deux espaces symétriques. À droite, Ève prend du fruit de l'arbre et le donne à un homme derrière elle ; la Mort l'accompagne au second plan. Au-dessus d'elle, le feuillage de l'arbre supporte le crâne d'Adam. La Chute d'Ève, et par elle, de l'Humanité, conduit à la mort. À gauche, Marie fait face à Ève et offre une hostie à un homme derrière elle. Le Christ en croix surplombe sa mère, dans les feuilles de l'arbre. Cette partie du médaillon met en évidence les correspondances typologiques entre le Christ et Adam ainsi qu'entre Marie et Ève. L'arbre est ainsi porteur de vie et de mort.
Un médaillon émaillé avec une représentation de l'arbre de vie conjugue à la fois une citation du Ps 24,10 et d'Ap 2,7 confortant les lectures typologiques entre l'Ancien et le Nouveau testament.
Inscription sur le pourtour : « Universæ viæ Domini, misericordia et veritas » (Ps 24,10), dans le phylactère : « qui vicerit dabo illi edere de ligno vitæ » (Ap 2,7). Conservé dans le Trésor de la Collégiale de Notre-Dame de Huy, le médaillon qui pourrait avoir fait partie d’un triptyque. Voir →Stavelot Triptych 1980,28 n°6.
La tradition mystique juive (Kabbale) elle-même déploie sa méditation de l’unipluralité divine sous forme d'un Arbre de Vie, l’« arbre séphirotique » :
Les séphiroth sont les dix puissances créatrices émanées de l'énergie du Créateur et faisant rayonner le Sans-fin (En Sof) dans le monde fini. En voici une traduction possible :
Dans l’architecture sacrée, tant juive que chrétienne, le motif de l'arbre de vie apparaît fréquemment, diversement stylisé.