La Bible en ses Traditions

Proverbes

 « — Le Seigneur m'a créée la première de ses œuvres, avant ses autres œuvres, dès l'origine » (Pr 8,22) : c'est la sagesse elle-même, personnifiée ici pour la première fois comme aide de Dieu présente à ses côtés dès avant la création, qui s'exprime ainsi dans ce livre !

Bien que situé dans le huitième chapitre, ce passage éclaire le concept fondamental de la Sagesse, envisagée comme la première œuvre de Dieu, soulignant son importance primordiale et son origine divine.

Au cœur de la →sagesse ancienne d'Israël, trésor du monde antique recelant la spéculation des sages aussi bien que le bon sens du peuple sous forme de conseils de comportement et de solutions à des problèmes courants, véritable mosaïque poétique de la pensée hébraïque, le livre des Proverbes explore la nature humaine, les principes de justice, les interactions sociales et la piété, en grande profondeur.

C'est une source intarissable de conseils pour mener une vie de sainteté. Le contenu se divise en sections distinctes, d'abord invitant à la quête de la Sagesse authentique, puis proposant des maximes sur la conduite de vie, et se clôturant sur les observations d'Agur et du roi Lemuel. Ces derniers chapitres célèbrent le verbe de Dieu et exaltent les vertus de la femme vertueuse, dont la valeur excède celle des perles. Le recueil abonde en enseignements succincts mais significatifs, orientant le fidèle vers une existence vertueuse. Son applicabilité transcende le temps, offrant une réflexion riche et pragmatique sur la spiritualité, la morale, et la vie quotidienne, le tout sous l'égide de la crainte du Seigneur comme commencement de toute sagesse.

La sagesse humaine qui s'exprime dans ce livre est bien le terreau dans lequel s'enracine la parénèse évangélique. Dans le canon chrétien, la personnification de la Sagesse et sa grande prosopopée (prise de parole) de Pr 8,22-31 annoncent l'identification du Christ-Verbe de Dieu avec la Sagesse incarnée. Cette réflexion est explicite dans l'épître aux Colossiens. Paul y présente le Christ comme l'incarnation de la Sagesse divine, détenant « tous les trésors de la Sagesse et de la connaissance » (Col 2,3). Cette perspective offre une continuité théologique entre les deux Testaments, soulignant la Sagesse divine comme pierre angulaire de la foi chrétienne.  Ainsi, bien que Pr 8,22 ne soit pas l'ouverture du livre, ce verset établit un principe fondamental sur la prééminence et l'origine divine de la sagesse qui résonne dans l’Epitre aux Colossiens. Le livre des Proverbes, en tant que pont entre les enseignements de l'Ancien et du Nouveau Testament, invite à une méditation sur la Sagesse éternelle de Dieu et son rôle essentiel dans la vie des croyants

TEXTE

Critique textuelle
Hébreu

Si le début et la fin des Proverbes ont un texte bien établi, le milieu du livre est sujet à des variations de qualité importantes.

Grec

Des différences majeures existent entre la Septante et le texte massorétique : ajouts, changement de l'ordre des proverbes par exemple. De plus, le texte grec est lui-même complexe, ce qui ne permet pas de discerner le texte hébraïque sur lequel il s'est appuyé.

Syriaque, latin, araméen

La Vulgate, la Peshitta et le Targum suivent le texte massorétique à quelques détails près.

Procédés littéraires caractéristiques

Une grande variété de traits stylistiques se retrouvent dans ce livre. Les premiers chapitres (1-9) déclinent les conseils didactiques d'un père à son fils, entrecoupés de deux prosopopées de la sagesse. Ensuite (10-29), c'est le mâshâl qui prédomine : de très courts proverbes. Enfin, les derniers chapitres (30-31) sont plus poétiques, voire savants et mystérieux.

Proposition d’une structure du livre

Six parties peuvent généralement être retrouvées dans le livre des Proverbes.

Genres littéraires

Le livre des proberbes s'inscrit dans le genre sapientiel. Il ne faut pas négliger la dimension poétique qui se dégage tant de la disposition du texte dans les manuscrits que des éléments littéraires.

CONTEXTE

Milieux de vie

Les Proverbes s'inscrivent dans une forme littéraire déjà bien attestée, comme en témoignent les Conseils d'un père à son fils, à Ugarit, ou encore la littérature égyptienne des Instructions ou des Maximes d'Amenemopé (11e av. J.C.).

Auteur/s

Les Proverbes ont été attribués à Salomon sur la foi de 1R 5,12 : Salomon « prononça trois mille sentences ». Cependant les différents sous-titres montrent qu'il s'agit plutôt d'une compilation de différents sages. Il faut de plus tenir compte de la possibilité de la fiction de ces attributions.

Datation

Les « proverbes de Salomon » sont généralement datés de l'époque royale, dans un milieu où l'administration se développe. Le travail d'édition final a dû voir le jour vers le 5e av. J. C. Cependant, des critiques récentes remettent en cause cette datation tardive (en particulier pour les premiers chapitres)

Formation

Les critiques s'accordent à dire que la mise par écrit par les scribes royaux, probablement assez tôt, a pris le relais de la transmission orale. Il est difficile de déterminer un plan précis des Proverbes qui sont plutôt une compilation de diverses sentences (comme en témoignent les divergences entre texte massorétique et Septante).

RECEPTION

Canonicité
AT

Le livre des Proverbes fait partie du canon hébraïque des Ecritures. Quand, dans l’Ecclésiastique, Ben Sira fait l’éloge de son aïeul Jésus qui s’est « appliqué à la lecture de la Loi, des Prophètes, et des autres livres des ancêtres » (Prol. 7-10) et qui « en est venu, lui aussi, à écrire quelque chose sur des sujets d’enseignement et de sagesse » (Prol. 12), peut-être est-ce une marque de la canonicité ancienne des Proverbes, ces « livres des ancêtres ».

Le Talmud

Mais le Talmud se fait l’écho de controverses autour de cette admission dans le canon, dues aux paradoxes comme « Ne réponds pas à l'insensé dans sa folie, réponds à l'insensé... » (Pr 26,4s), ou à la description inconvenante de la femme adultère (Pr 7,7). C’est le Concile de Jamnia (vers 100 ap. J.-C.) qui dissipe définitivement ces objections.

NT

Il contient quatorze citations des Proverbes (souvent selon la Septante)

Il atteste en plus une vingtaine d'allusions, surtout des passages où le Christ est assimilé à la Sagesse préexistante (Jn 1,1-18 ; Col 1,15-20 ; Ap 3,14).

Citation chez les Pères apostoliques

Les mêmes citations et allusions se retrouvent chez les Pères apostoliques : 

Poursuite tardive du débat

Au dire du Concile de Constantinople de 553, Théodore de Mopsueste (†428) seul en conteste l’inspiration, comme le font plus tard Baruch Spinoza (†1677) et Jean Leclerc (†1736).

Importance traditionnelle

La tradition chrétienne a plutôt négligé le livre des Proverbes : il n'est guère commenté par les Pères, qui se contentent de le citer fréquemment. Il n’est pas non plus uniformément commenté ; ce sont surtout le chap. 1, la Sagesse créatrice (8,22-31), la Sagesse hospitalière (9,1-6), les proverbes numériques (30,15-33), et l’éloge de la femme forte (31,10-31) qui retiennent l’attention.

Ensuite les commentaires, entre autres, de :