La Bible en ses Traditions

Sagesse de Salomon

« Avec toi est la Sagesse qui connaît tes œuvres, qui était là quand tu faisais l'orbe des terres et qui sait ce qui est agréable à tes yeux et ce qui est conforme à tes commandements » (Sg 9,9) : c'est ce mystérieux personnage de la Sagesse (Sophia) qui donne son nom au livre le plus récent de l'Ancien Testament, appelé aussi Sagesse de Salomon. Il fut composé à Alexandrie au tournant de l'ère chrétienne.

Le livre de la Sagesse reflète les préoccupations des Juifs de la Diaspora en Égypte et établit un dialogue entre la tradition juive et la culture grecque, dialogue qui élargit l'horizon culturel du peuple de l'Ancien Testament et l'ouvre à l'universalité de Dieu. En général il se situe dans le contexte égyptien et hellénistique de philosophies diverses (Sg 8,7 ; 9,15), de polythéisme païen (Sg 15,18), d'hédonisme et de luxure (Sg 2,6-9), en contrepoint d'une forme de persécution des Juifs fidèles par les Juifs apostats (Sg 2,12-20).

Le livre se compose de trois parties : la première (Sg 1-5), de caractère plutôt moral, propose la Sagesse comme source de bonheur et discute l'immortalité de l'âme ainsi que la rétribution du bien et du mal après la mort (Sg 1,1-5 ; 3,1-12). La deuxième section (Sg 6-9), spéculative, examine la nature de la Sagesse. La troisième partie (Sg 10-19) traite du parcours de la Sagesse à travers l'histoire du salut.

La Sagesse procède de Dieu (Sg 9,6) avec lequel elle entretient des relations privilégiées : vivre auprès de lui (Sg 8,3), s'asseoir à côté de son trône (Sg 9,4), connaître ses secrets (Sg 7,21). La révélation de la Sagesse atteint son sommet à la fin du chapitre 7, qui évoque la Sagesse en elle-même (Sg 7,22-24), dans sa relation avec Dieu (Sg 7,25s) et dans sa relation avec l'homme (Sg 7,27s).

La Sagesse est-elle un attribut de Dieu ou une personne ? Certes, l'auteur pourrait n'offrir ici qu'une personnification poétique de l'attribut divin de la Sagesse, mais à la lumière du Nouveau Testament, il est possible d’y voir esquissé le dévoilement du mystère de la Sainte Trinité. En effet, l'influence de la Sagesse de Salomon dans le Nouveau Testament est très profonde.

Enfin, la personnification de la Sagesse rejoint de nombreuses autres figures féminines dans la mémoire chrétienne, pour élaborer la théologie de la Mère de Dieu, inspirer de nombreux récits apocryphes et nourrir la piété mariale.  

TEXTE

Critique textuelle
Grec

La première rédaction du livre de la Sagesse a été faite en grec. Quatre manuscrits en onciales le comportent, dans un texte en bon état, B (Vaticanus, 4e s.), S (Sinaïticus, 4e s.), A (Alexandrinus, 5e s.) et C (Codex Ephraemi rescriptus, 5e s.) ainsi que d'autres en minuscules.

Latin

La Vulgate a repris la version de la Vetus Latina.

Autres versions

Le livre de la Sagesse existe en arménien (5e s.) et en syriaque (7e s. syro-hexaplaire)

Procédés littéraires caractéristiques
Proposition d'une structure du livre
Genres littéraires

Le genre littéraire principal de la Sagesse de Salomon est l’éloge tel qu’il est défini dans les ouvrages des rhétoriciens antiques : Aristote, Cicéron et Quintilien.

CONTEXTE

Milieux de vie

Le Livre de la Sagesse s'enracine dans les structures et les outils de la culture hellénistique.

Il faut noter d’importantes analogies entre le livre de la Sagesse et des traités rhétoriques comme le premier Paradoxe des stoïciens de Cicéron (106-43 av. J.-C.), Sur la noblesse de Philon d’Alexandrie (20 av. J.-C. - 54 ap. J.-C.) ou Sur la clémence de Sénèque le Jeune (4 av. J.-C. - 65 ap. J.-C.).

Mais la réflexion avance avant tout sur des concepts bibliques que l'auteur approfondit grâce à sa connaissance de l'histoire d'Israël.

Auteur/s et datation
L'auteur selon la tradition : Salomon.

Cette attribution s'appuie sur la fiction littéraire de l'énonciateur royal et plein de sagesse.

Hypothèse historique sur l'auteur

Il s'agit probablement d'un auteur appartenant au judaïsme hellénisé, vivant peut-être à Alexandrie, ce qu'appuient les multiples allusions à l'Égypte et aux pratiques zoolâtriques.

Son vocabulaire et une allusion aux demandes d’égalité civique des Juifs alexandrins (Jn 19,6) comme son utilisation de la Septante permettent de le dater du 1er s. av. J.-C.

RECEPTION

Canonicité
Importance traditionnelle
Intertextualité

Le NT ne cite pas la Sagesse à proprement parler mais certaines comparaisons avec Paul et Jean permettent de constater une réelle influence de la Sagesse sur ces deux auteurs.

L'influence de la Sagesse sur Jean est peut-être encore plus profonde. En ce qui concerne les relations du Verbe avec le Père et avec les hommes, la Sagesse a frayé les voies à l'auteur du quatrième Évangile. Voici les rapprochements les plus suggestifs :

Enfin, écrits johanniques et Sagesse comprennent l'histoire du cosmos et de l'âme humaine de manière très semblable : lutte entre la lumière et les ténèbres, entre la vie et la mort, et triomphe de la lumière malgré ses revers apparents.

Exégèse

Dans la tradition chrétienne les mêmes textes du livre sont presque toujours allégués pour leur portée doctrinale en christologie et en doctrine trinitaire, quelles que soient les Églises, les époques et les Pères. Les formules de Sg 7,25s seront souvent reprises par les Pères à propos du Christ, Verbe incarné.

Néanmoins pour trouver les premiers commentaires du livre dans son ensemble, il faut attendre :

Ils sont suivis par ceux de :

Liturgie