La Bible en ses Traditions

Ecclésiaste 1,12–18

M S
G
V

12  Moi, Qohélet, j’ai été roi d’Israël en Jérusalem

12  Moi, Qohélet, j’ai été roi d’Israël en Jérusalem.

12  Moi, l'Ecclésiaste, je fus roi d’Israël en Jérusalem.

12 La tâche pénible vouée à l’homme Gn 3,17-19 ; Qo 3,10

13 et j’ai adonné mon cœur à rechercher et à explorer par la sagesse tout ce qui se fait sous le ciel.

C’est un mauvais souci que Dieu a donné aux fils de l’être humain de se soucier.

13 Et j’ai adonné mon cœur à chercher et à inspecter dans la sagesse toutes choses existantes sous le ciel,

parce que c’est un mauvais tracas que Dieu a donné aux fils de l’homme pour qu’ils s’en tracassent

13 Et je me proposai en moi-même de rechercher et d’examiner sagement toutes choses qui se passent sous le soleil.

Cette occupation très mauvaise, Dieu l'a donnée aux fils des hommes pour qu’ils s’y occupassent.

14  J’ai vu toutes les œuvres qui se font sous le soleil, et voici le tout : absurdité et poursuite de vent ! 

14  J’ai vu toutes les œuvres qui ont été faites sous le soleil. Et voici, tout est vanité et choix de vent.

14  J’ai vu l'ensemble de ce qui se fait sous le soleil et voici toutes choses vanité et affliction d’esprit.

14 Poursuite de vent Os 12,2

15  Ce qui est courbé ne peut devenir droit, ce qui manque ne peut être compté. 

15  Ce qui est tordu ne pourra être honoré, et ce qui manque ne peut être compté.

15  Les pervers difficilement se corrigent et des insensés infini est le nombre.

16   J’ai parlé, moi, à mon cœur, en disant :

— Moi, voici que j’ai fait grandir et accroître la sagesse plus que tous ceux qui ont existé avant moi à Jérusalem,

et mon cœur a vu beaucoup de sagesse et de savoir,

16  J’ai parlé, moi, à mon cœur, en disant :

— Moi, voici que je suis devenu grand et que j’ai acquis plus de sagesse que tous ceux qui ont existé avant moi à Jérusalem,

et mon cœur a vu beaucoup de sagesse et de savoir,

16  J’ai parlé en mon cœur, disant :

— Voilà que je suis devenu grand et que j’ai surpassé en sagesse tous ceux qui ont été avant moi dans Jérusalem.

Mon esprit a contemplé beaucoup de choses avec sagesse et il a appris.

16 La sagesse de Salomon 1R 3,12 ; 5,9s ; 10,1-8.23s ; 2Ch 9,22s ; Si 47,14-17

17  et j’ai dû adonner mon cœur à comprendre la sagesse et à comprendre la démence et la folie.

J’ai compris que cela aussi est recherche de vent. 

17  Et j’ai adonné mon cœur à connaître sagesse et connaissance ; paraboles et sciences,

j’ai connu et vraiment cela aussi est choix de vent.

17  Et j’ai adonné mon cœur à connaître la prudence et la doctrine, les erreurs et la folie

et j’ai reconnu qu’en elles aussi il y avait labeur et affliction de l'esprit

18  Car beaucoup de sagesse, beaucoup de chagrin et qui accroît le savoir accroît la souffrance. 

18   Car avec beaucoup de sagesse, beaucoup de connaissance, et qui accroît la connaissance accroîtra la souffrance.

18  parce qu'il est à craindre qu’avec beaucoup de sagesse on ait beaucoup de raisons de s'indigner, et que qui accumule la science accumule aussi la peine.

Réception

Liturgie

1,1–14,14 SYNAGOGUE Lecture juive à Sûkkôt De nos jours, à la synagogue, de nombreux Juifs lisent Qohélet (l'Ecclésiaste) à la fête des Huttes (Sûkkôt).  Le choix de ce livre vient de ce que cette fête célèbre dans la joie (Musique) le souvenir des huttes où Dieu avait fait habiter son peuple après la sortie d’Égypte et du fait que Qo est censé faire la promotion de la joie (Qo 2,24ss ; 3,12.22 ; 5,17ss ; etc.).

  • L’habitude de lire Qo à Sûkkôt est toutefois tardive (10-11e s.), puisqu’elle n’est même pas signalée dans la liste que dresse le traité post-talmudique intitulé Mas. sôperîm 14,3 qui énumère les lectures des différents rouleaux lors des fêtes juives (254-255).

Peut-être peut-on aussi voir dans les tentes, les Sûkkôt que construisent les Juifs pour cette fête, et dans laquelle ils vivent durant plusieurs jours, un vivant symbole et un rappel liturgique de la fragilité du séjour de l'homme sur la terre, thème si central dans le livre de Qohélet ? 

Simon Mannweiler, « Sukkah in Mea Shearim, Jewish ultra-othordox neighbourhood, Jerusalem », (photographie numérique, 2008)

© CC BY-SA 4.0→

Le temps de la fête, pieds des immeubles et balcons se transforment, avec des planches, en résidences plus frêles, où revivre l'expérience de la liberté et de la joie des nomades au désert ...

Simon Mannweiler, « Sukkah near Western Wall in Jewish Quarter, Jerusalem », (photographie numérique, 2008)

© CC BY-SA 4.0→

La proximité des éphémères constructions de Sukkot et du mur occidental, vestige du Temple résidence du Nom sur la terre, donne à méditer, dans l'esprit de l'Ecclésiaste, sur ce qui est stable et sur ce qui passe, dans la relation entre l'homme et Dieu...

1,1–12,14 Liturgie synagogale : une des lectures principales de la fête de Sukkoth (Tentes)

CALENDRIER — LECTIONNAIRE

La lecture du Livre de Qohelet au cours de l'office du matin du sabbat de hol hamoëd (« [période] profane du temps fixé » : période de quelques jours mi-chômés entre le début et la fin de la fête de Pâque et de la fête ddes Tentes), ou du premier jour de la fête, si le 15 tishre est un sabbat, est une institution rabbinique tardive visant à maintenir les manifestations de joie à un seuil raisonnable. Les discussions sur la vanité de l'existence et le rappel que l'homme rendra compte de tous ses actes devant Dieu viennent tempérer l'allégresse. Arts visuels Qo 1,1–12,14 

Tradition chrétienne

1,1–12,14 Questions sur l’inspiration du livre (Séminaire des Sources Chrétiennes — HiSoMA→)

Inspiration et caractère prophétique

Qo a fait l’objet d’un nombre appréciable de commentaires, d’homélies et de citations chez les auteurs patristiques, qui reconnaissaient généralement le caractère inspiré, et même prophétique, du livre.

  • Grégoire le Thaumaturge Metaphr. Eccl.1,1, à l’instar de la tradition juive, affirme que l’auteur du livre est non seulement un roi et un sage, mais aussi un prophète ; il est même « le roi le plus honoré et le prophète le plus sage des êtres humains » (SBLSCS 29,7).

Le mot rêmata, « paroles » (Qo 1,1), amène en particulier des réflexions sur l’inspiration de l’Esprit Saint et le caractère prophétique de l’Ecclésiaste, par exemple

  • Didyme d'Alexandrie Comm. Eccl. 7,9-14 : « À proprement parler, dans les Écritures inspirées, l’auteur, c’est l’Esprit qui souffle ce qui est à dire ; mais il est secondé par un sage. Car ce n’est pas l’Esprit qui grave invisiblement les lettres et qui met les mots, mais il les inspire à une âme. Ou bien c’est Salomon lui-même qui écrit cela, ou bien ce sont des sages qui ont écrit cela. C’est peut-être cette hypothèse que nous préférons, pour qu’on ne pense pas que celui qui parle, parle de lui-même. Donc ce sont donc des paroles (rêmata) au lieu de discours (logoi) de l’Ecclésiaste ; car de diverses manières, les paroles sont saisies à travers des discours » (PTA 25,16-18, trad. B. Meunier).

La question des locuteurs

Le caractère déroutant de certaines affirmations a de fait conduit certains exégètes à les interpréter comme dites au nom d’autres personnes.

  • Olympiodore le Diacre Comm. Eccl. « Il faut savoir aussi que le sage Ecclésiaste parle tantôt en son propre nom, tantôt en celui d’une personne que ce monde déconcerte » (éd. Boli, 1).

Selon plusieurs, Salomon aurait donc rapporté dans son livre maintes doctrines impies ou hérétiques afin de les combattre. Par exemple :

Cela peut conduire à élargir le propos à toute l’Église, sans remettre en question le bien-fondé des affirmations :

  • Didyme d'Alexandrie Comm. Eccl. 9,30-32 : « Il ne faut pas attribuer à un seul et même personnage tout ce qui est annoncé dans ce livre, mais à toute la foule de l’Église dans son ensemble » (PTA 25,34).

Méfiances à l’égard de Qo

Les témoignages de rejet ou de prudence vis-à-vis du livre sont assez rares :

  • Philastre Haer.,134, évêque de Brescia, rappelle, dès la seconde moitié du 4e s., que certains hérétiques rejettent le livre de l’Ecclésiaste (PL 12,1265).
  • Théodore de Mopsueste Actes du 5e concile œcuménique, cité dans les Actes du 5e concile œcuménique, de l’Église syriaque, dont l’œuvre a presque entièrement disparu à cause de sa condamnation au Concile de Constantinople en 553, attribue une inspiration de degré inférieur au livre de Qo, mais sans proposer pour autant son exclusion formelle du canon (Zaharopoulos 1989, 33).
  • Giannozzo Manetti De dignitate et excellentia hominis (1452), grand humaniste chrétien, cite Qo dans sa liste noire au 15e s. et seul le respect du canon des Écritures le retient de condamner ce livre au feu (de Lubac 1974, 236).

Musique

1,1–2,26 Vanité des vanités

17e s.

Cristofaro Caresana (1640-1709), Vanitas vanitatum et omnia vanitas

Mysterium Vocis, Cappella de' Turchini, Antonio Florio

© License YouTube Standard→, Qo 1,1-2,26