La Bible en ses Traditions

Psaumes 44,1–27

M V
G S

Au maître de chant. Des fils de Coré.Cantique

VVERS LA FIN AUX FILS DE CORÉ POUR L'INTELLIGENCE

...

M
G S
V

Dieu, de nos oreilles nous entendîmes,

nos pères nous annoncèrent 

l’œuvre à laquelle tu œuvras en leurs jours, aux jours anciens :

...

Dieu, nous avons entendu de nos propres oreilles,

nos pères nous ont annoncé

l'œuvre que tu œuvras en leurs jours, aux jours antiques :

de ta main tu as chassé des nations et tu les as implantées

tu as frappé des peuples et tu les as mis au large.

...

ta main disperse les nations, mais eux, tu les plantas,

tu affligeas des peuples et tu les expulsas ;

M V
G S

car

Vet en effet, ce ne fut pas avec leur épée

Vpar leur glaive qu’ils ont conquis le pays

Vpossédèrent la terre

ni

Vet leur bras qui leur a donné la victoire,

Vne les sauva pas,

mais ta droite et ton bras

et la lumière

Vl'illumination de ta face

parce que tu te complus en eux !

Vdès lorsqu'en eux tu te complus !  

...

Toi,

VToi-même es mon roi, ô Dieu :

V et mon Dieu, 

ordonne le salut

Vtoi qui commandes les saluts de Jacob :

...

M
G S
V

Par toi nous renverserons nos ennemis

en ton nom nous piétinerons nos adversaires

...

en toi nous ventilerons nos ennemis à coups de cornes, 

en ton nom nous écarterons ceux qui se dressent contre nous !

M V
G S

En effet, ce n’est pas en mon arc que je me confie

V j'espérerai, 

et ce n’est pas

Vmême mon épée

Vglaive qui

Vne me sauvera Vpas ;

...

Mais c’est toi qui nous délivres

Ven effet, tu nous sauvas de nos ennemis

Vceux qui nous affligeaient, 

ceux qui nous haïssent

Vhaïssaient tu les confonds.

Vtu les confondis 

...

M
G S
V

En Dieu nous nous glorifions tout le jour

et nous célébrons ton nom à jamais.

— Séla.

...

(en Dieu nous nous féliciterons tout le jour)

et dans ton Nom nous confesserons tout cela pour les siècles !

DIAPSALMA 

10 Pourtant tu nous as rejetés et couverts de honte

et tu ne sors plus avec nos armées.

10 ...

10  Maintenant, au contraire, tu nous as repoussés, confondus :

tu ne sortiras plus au sein de nos armées 

M V
G S

11 tu nous fais reculer devant l'ennemi

Vas fait tourner le dos à nos ennemis

et

V(et dire que ceux qui nous haïssent nous dépouillent

Vétaient en train de nous piller !) ;

11 ...

12 tu nous livres

Vas livrés comme des brebis de boucherie

et parmi les nations tu nous  dispersas

Vas dispersés ;

12 ...

M
G S
V

13 tu vends ton peuple à vil prix

tu ne l’estimes pas à une grande valeur.

13 ...

13 tu as mis en vente ton peuple sans marquer de prix

et pour pas grand'chose on a été troqués !

M V
G S

14 Tu fais

Vas fait de nous un opprobre pour nos voisins,

une raillerie et une dérision pour ceux qui nous entourent,

14 ...

M
G S
V

15 Tu fais de nous la fable des nations

et sur nous les peuples branlent la tête.

15 ...

15 tu as fait de nous un objet de fable pour les nations,

un hochement de tête parmi les peuples.

16 Tout le jour ma confusion est devant moi

et la honte couvre mon visage

16 ...

16  À longueur de journée ma honte est contre moi

et la confusion de ma face m'a couvert entièrement   

M V
G S

17 à la voix de celui qui m’insulte

Vm’outrage  et m’outrage

Vme contredit,

à la vue de l’ennemi et de qui respire vengeance !

Vdu persécuteur !

17 ...

18 Tout cela nous arrive

Vest arrivé  sans que nous t’ayons

Vmais nous ne t'avons pas oublié

sans que nous ayons trahi

Vni n'avons trahi ton alliance,

18 ...

19 notre cœur ne s’est pas détourné

Vn'a pas reculé en arrière 

et nos pas n'ont pas dévié

Vmais tu as fait dévier nos sentiers de ta voie

19 ...

20 pour que

Vdès lors tu nous écrases dans la retraite des chacals

Vas humiliés au lieu de l'affliction

et tu nous couvres de

Vnous a couverts l’ombre de la mort ...

20 ...

21 Si nous avions

V avons oublié le nom de notre Dieu

et ÷si nous avons tendu les mains vers un dieu étranger,

21 ...

M
G S
V

22 Dieu ne l’aurait-il pas aperçu 

lui qui connaît les secrets du cœur ?

22 ...

22 est-ce que Dieu ne le découvrira pas ?

C'est lui, en effet, qui connaît les recès du cœur !

Puisqu'à cause de toi nous sommes mortifiés tout le jour,

nous sommes estimés brebis bonnes pour l'abattoir :

23 Mais c’est à cause de toi qu’on nous égorge tout le jour

qu’on nous regarde comme des brebis d'abattoir.

23 ...

23 Lève-toi ! Pourquoi dors-tu Seigneur ?

Lève-toi ÷et ne nous rejette pas jusqu'à la fin !

24 Éveille-toi ! Pourquoi dors-tu, Seigneur ?

Réveille-toi, et ne nous rejette pas pour toujours.

24 ...

24 Pourquoi détournes-tu la face ?

Oublies-tu notre indigence et notre tribulation ?

25 Pourquoi caches-tu ta face

oublies-tu notre misère et notre oppression ?

25 ...

25 Puisque notre âme est humiliée dans la poussière,

notre ventre agglutiné à la terre,

26 Car notre âme est effondrée dans la poussière

notre ventre colle à la terre.

26 ...

26  Lève-toi, aide-nous

et nous rachète, à cause de ton nom ! 

27 Lève-toi pour nous secourir, délivre-nous à cause de ta bonté !

27 ...

27  

Texte

Grammaire

9 dans ton Nom nous confesserons tout cela (V) Rareté grammaticale Dans le psautier, on trouve ici le seul usage de confiteor avec in + ablatif. En latin classique, le verbe est transitif, à l'époque postclassique il est suivi du datif quand il connote la louange et l'action de grâce. On pourrait traduire « nous rendrons grâce à ton nom » ; il nous semble possible de traduire « confesser » (Littérature Ps 44,9) : 

  • Le lexème « in nomine tuo »  fait du Nom divin  un moyen par lequel, où un lieu dans lequel, se fait la confession de foi en la puissance de Dieu . On peut agir « dans son Nom » un peu comme on pose des actes de culte dans le Temple ! (cf. →Nom divin ,4).
  • Le vers qui précède (que nous avons placé entre parenhèses) constitue une incise qui transcrit la réaction immédiate de ceux qui disent ce psaume au souvenir des saluts divins tout juste rapportés au v.8 (de fait ce colon traite de Dieu en 3e pers. alors qu'il est interpellé à la 2e pers. depuis le début du psaume, et de nouveau au colon suivant).
  • On peut sous-entendre, comme COD de confiteor, l'ensemble de l'« œuvre œuvrée » par Dieu rappelée dans tous les versets qui précèdent.

Grammaire © Fair Use→ 

Procédés littéraires

6 ventilerons (V) Métaphore agricole ? Il peut s'agir de l'action de soulever en l'air des branches ou des épis, pour en extraire grains et fruits quand elles tombent. Le verbe « ventiler » s'utilise encore en contexte de conflit en français :

George Lautner (scén. Albert Simonin ; dial. Michel Audiard;  mus. Michel Magne),  Les Tontons Flingueurs (film, 105 mn, France, Allemagne, Italie : Gaumont et alii, 1963)

comédie policière avec Lino Ventura, Bernard Blier Jean Lefebvre, Francis Blanche, Venantino Venantini, Robert Dalban, Sabine Sinjen, Claude Rich, Gaumont et al., 

© Licence YouTube standard

Benard Blier évoque dans le langage truculent de Michel Audiard la dispersion, la pulvérisation, la ventilation des ennemis.

Réception

Comparaison des versions

1 V—IUXTA HEBR.

  • POUR LA VICTOIRE DES FILS DE CORÉ. DE L'INSTRUCTION

3 V—IUXTA HEBR.

  • De ta main tu as détruit des nations et tu les as implantées | tu as affligé des peuples et tu les as mis au large.

4 V—IUXTA HEBR. 

  • car ce ne fut pas à coups de glaive qu'ils prirent possession de la terre | ni leur bras qui les sauva | mais ta droite et ton bras et la lumière de ton visage | parce que tu te complus en eux !

5 V—IUXTA HEBR. 

  • C'est toi qui es mon roi et mon Dieu | ordonne les saluts de Jacob

6 V—IUXTA HEBR.

  • en toi nos ennemis, nous les ventilerons | en ton nom nous piétinerons nos adversaires

7 V—IUXTA HEBR.

  • Car ce n’est pas en mon arc que je me confierai | et ce n’est pas mon épée qui me sauvera.

9 V—IUXTA HEBR.

  • Dans le Seigneur nous nous réjouirons tout le jour | et nous célébrerons ton nom à jamais |  TOUJOURS

10 V—IUXTA HEBR. 

  • Mais tu nous as repoussés et confondus | et tu ne feras pas de sortie avec nos armées : 

11 V—IUXTA HEBR. 

  • tu nous as fait tourner le dos devant l'ennemi | pourtant ceux qui nous haïssaient nous avaient pillés

12 V—IUXTA HEBR.

  • Tu nous as livrés comme un troupeau à dévorer | tu nous as dispersés parmi les nations

13 V—IUXTA HEBR.

  • Tu as vendu ton peuple à vil | et son prix ne fut pas grand.

14 V—IUXTA HEBR.

  • Tu as fait de nous un opprobre pour nos voisins | une moquerie et une raillerie pour ceux qui nous entouraient

15 V—IUXTA HEBR.

  • Tu as fait de nous la fable des nations | et un hochement de tête des tribus.

16 V—IUXTA HEBR.

  • Tout le jour ma confusion est devant moi | et l'ignominie de ma face m'a couvert tout entier

17 V—IUXTA HEBR.

  • à la voix de celui qui m’outrage et blasphème | à la vue de l’ennemi et de celui qui respire vengeance

19 V—IUXTA HEBR. 

  • notre coeur n'a pas reculé en arrière | ni nos pas n'ont dévié de tes sentiers

20 V—IUXTA HEBR.

  • car tu nous as précipités dans la retraite des dragons | et que tu nous as couverts de l’ombre de la mort

22 V—IUXTA HEBR.

  • Dieu ne découvrira-t-il pas cela ? | lui en effet connaît les pensées du cœur | car à cause de toi nous avons été mis à mort tout le jour | nous avons été regardés comme un troupeau de boucherie

23 V—IUXTA HEBR.

  • Lève-toi, pourquoi dors-tu Seigneur ? | réveille-toi, pourquoi nous rejettes-tu pour toujours ?

24 V—IUXTA HEBR.

  • pourquoi caches-tu ta face | oublies-tu nos afflictions et nos angoisses ?

25 V—IUXTA HEBR.

  • Car notre âme fut courbée dans la poussière | notre ventre a adhéré à la terre

26 V—IUXTA HEBR.

  • Lève-toi, viens à notre secours | et rachète-nous à cause de ta miséricorde.

Liturgie

8s Tu nous as libéré Graduel

« Liberasti nos »

Traditionnel, Graduel - Liberasti nos

Chœur des moines de l’abbaye Sainte-Madeleine du Barroux

© Abbaye du Barroux→, Ps 44,8s

Littérature

9 nous confesserons  V dit littéralement « nous confesserons en/à (?)  ton nom » (cf Grammaire Ps 44,9). On a étoffé un peu ici, car en français courant (comme dans celui de fidèles dès le 4e s. à en croire saint Augustin : Tradition chrétienne Ps 44,1 ; 20118,1.29 !), les mots « confession » ou « confesser » évoquent surtout le sentiment de culpabilité, l'auto-accusation, ou le ... confessionnal ! Mais ces significations devenus habituelles ne sont que dérivées.  Dans l'Écriture, et particulièrement dans le psautier latin, le verbe confiteor traduit le verbe grec exomologeô qui signifie « promettre, consentir, avouer, confesser, glorifier, rendre grâce » ; le sens dominant de l'acte de parole désigné par le verbe est celui de la confessio laudis

Pour évoquer toute la richesse de ce mouvement de l'âme si profond, la traduction gardera autant que possible les mots « confession » ou « confesser ».

Drapeau de la francophonie→ © Domaine public 

Arts visuels

10–27 Le peuple juif livré au massacre, et l'apparente inaction de Dieu : les artistes et la Shoah

Autoportraits, 20e s.

Felix Nussbaum (1904-1944), Autoportrait, (huile sur panneau, ca. 1940)

maison Felix Nussbaum, Osnabrück, Allemagne, Domaine public © Wikimedia commons→

Felix Nussbaum fut formé au temps de la « Nouvelle Objectivité » et au contact des avant-gardes européennes – la peinture métaphysique italienne, le surréalisme international. En 1933, lorsque Hitler accède au pouvoir, il est mis au ban de l’académie des Beaux-Arts de Berlin et forcé à l’exil. Après l’Italie, la Suisse et la France, il se réfugie à Ostende, en Belgique. Interné en 1940 au camp de Saint-Cyprien, dans le sud de la France, après la défaite belge, il s’évade et retourne à Bruxelles, où il demeure caché, avec son épouse Felka Platek, une artiste juive polonaise. Ils furent finalement déportés à Auschwitz, le 31 juillet 1944. Prenant pour maîtres le Douanier Rousseau, Van Gogh, Beckmann, Ensor, Chirico, il est aussi influencé dans son goût pour l’autoportrait et ses allégories de la Mort par les maîtres anciens flamands et allemands. Sa peinture porte toute une réflexion existentialiste sur la condition du juif pourchassé.

Felix Nussbaum (1904-1944), Autoportrait avec le passeport juif, (ca. 1940)

maison Felix Nussbaum, Osnabrück, Allemagne, Domaine public © Wikimedia commons→

20e s.

Charlotte Salomon (1917-1943), La nuit de cristal, (gouache sur papier, ca. 1940-1942), 25 x 32,5 cm

Jewish Historical Museum, Amsterdam, Pays-Bas, Domaine public © Wikimedia commons→

Charlotte Salomon, née à Berlin dans une famille juive aisée, dut affronter l’antisémitisme à l’école et à l’Académie des arts de la capitale, ainsi que le suicide de sa mère en 1926 et de sa grand-mère en 1940. Internée avec son grand-père au camp de Gurs, ils en sont libérés quelques mois plus tard en raison du mauvais état de santé du grand-père et parviennent à regagner la Côte d'Azur, où elle se marie. En 1943, le couple est arrêté, transféré à Drancy puis acheminé vers Auschwitz. Le 10 octobre, immédiatement à son arrivée, Charlotte, enceinte de cinq mois, fut envoyée dans les chambres à gaz. Son mari mourut à son tour le 1er janvier suivant. La peinture fut d’abord pour elle un moyen de lutter contre le désespoir. De la fin 1940 à la mi-1942, elle se consacre à son œuvre autobiographique Leben? oder Theater? (Est-ce la vie ou du théâtre ?). En 18 mois, elle peint environ 1 325 gouaches ou aquarelles, dont 800 environ sont terminées, à partir des trois seules couleurs primaires : rouge, jaune et bleu.