La Bible en ses Traditions

Matthieu 1,21–4,4

Byz V S TR Nes

21 Et elle enfantera un fils et tu l'appelleras du nom de « Jésus »

car lui-même sauvera son peuple de ses péchés.

22 Tout cela arriva

pour que s'accomplît la parole dite 

V Sce qui a été dit par le Seigneur à travers le prophète qui disait :

23 « Voici, la Vierge sera enceinte et enfantera un fils, et on l'appellera du nom d'"Emmanuel" »

ce qui se traduit : « Dieu avec nous ».

24 Réveillé de son sommeil, Joseph fit comme l’ange du Seigneur lui avait prescrit

et il reçut

Vaccueillit son épouse.

25 Et il ne la connut pas jusqu’à ce qu’elle eût enfanté un fils 

Byz V S TRson fils premier-né 

et il

Selle l'appela de son nom « Jésus ».

2,1 Jésus étant né

VComme Jésus était né à Bethléem de Judée aux jours du roi Hérode

voici, des mages d’Orient arrivèrent

Vvinrent à Jérusalem

2,2 disant :

— Où est le roi des Juifs qui a été enfanté

Vest né ?

Car nous avons vu son étoile à l’orient

et nous sommes venus l’adorer.

2,3 En entendant [cela] le roi Hérode fut troublé, et tout Jérusalem avec lui.

2,4 Et, rassemblant tous les chefs des prêtres et les scribes du peuple,

il s'enquit auprès d'eux : — où le Christ devait naître ?

2,5 Ils lui dirent : — À Bethléem de Judée

car ainsi a-t-il été écrit par le prophète :

2,6 « Et toi Bethléem, Byz V TR Nesterre de Juda, tu n’es pas la moindre parmi les chefs-lieux

Sroyaumes de Juda

car de toi sortira un chef

Vprince Byz S TR Nes, celui qui paîtra

Vrégira mon peuple Israël. » 

2,7 Alors Hérode, ayant secrètement appelé les mages, se fit préciser par eux

Vse renseigna avec soin auprès d'eux sur le moment où l’étoile était apparue.

2,8 Et, les envoyant à Bethléem, il dit :

— Allez, informez-vous précisément

Vavec soin au sujet de l’enfant.

Et quand vous aurez trouvé, faites-moi l'annonce

Vfaites-moi un rapport 

afin que moi aussi j’aille l’adorer.

2,9 Quant à eux, ayant 

VQuand ils eurent entendu le roi, ils partirent.

Et voici, l’étoile qu’ils avaient vue à l’orient les précédait 

Vmarchait devant eux 

jusqu’à ce que, en venant au-dessus du lieu où était l'enfant, elle s'arrêta.

V' elle vienne s'arrêter au-dessus de là où était l'enfant.

2,10 En voyant l'étoile, ils se réjouirent d'une très grande joie.

2,11 En entrant dans la maison, ils virent

Byz V S TRtrouvèrent l’enfant avec Marie, sa mère,

et, tombant

Vse prosternant, l’adorèrent ;

et, leurs trésors ouverts, ils lui présentèrent

Voffrirent des dons : de l’or, de l’encens et de la myrrhe.

2,12 Et ayant été avertis en songe

Vreçu dans des songes l'oracle de ne pas retourner vers Hérode

par un autre chemin regagnèrent leur région.

2,13 Alors qu'ils s'en étaient retournés

voici, un ange du Seigneur apparut en songe à Joseph, disant :

— Lève-toi, prends l’enfant et sa mère

et fuis en Égypte

et reste là-bas jusqu’à ce que je te dise 

car il arrivera qu'Hérode cherchera l’enfant pour le faire périr

Vperdre.

2,14 Lui, 

SJoseph, s'étant levé, prit avec lui l'enfant et sa mère de nuit et se retira en Égypte.

2,15 Et il fut là-bas jusqu’à la mort d’Hérode

afin que fût accomplie la parole dite 

Vaccompli ce qui avait été dit par le Seigneur à travers le prophète, disant :

« D'Égypte j'ai appelé mon fils. »

2,16 Alors Hérode, voyant que les mages s'étaient joués de lui, fut très en colère

et il envoya tuer tous les enfants Vqui étaient dans Bethléem et dans toute sa région

depuis l’âge de deux ans et au-dessous, d’après le temps qu'il s'était fait préciser par les mages.

2,17 Alors s'accomplit la parole dite

Vce qui a été dit par Jérémie le prophète disant :

2,18 « Une voix en Rama a été entendue, Byz TRlamentations, pleurs et plaintes nombreuses :

Rachel pleure ses enfants ; et elle ne voulait 

Vvoulut pas être consolée, parce qu’ils ne sont plus. »

2,19 Hérode étant mort 

voici, un ange du Seigneur apparut en songe à Joseph en Égypte

2,20  disant :

— Lève-toi, prends l’enfant et sa mère

et va en terre d’Israël

car ils sont morts, ceux qui recherchaient la vie de l’enfant.

2,20 La mort des persécuteurs. Ex 4,19

2,21 Lui, 

SJoseph, s’étant levé, prit l’enfant et sa mère, et entra 

Byz V S TRvint en terre d’Israël.

2,22 Entendant qu’Archélaüs régnait en Judée à la place d’Hérode son père, il craignit de s'y rendre

et, averti en songe, il se retira dans la région de la Galilée

2,23 et il vint s'installer

Vhabiter dans une ville appelée Nazareth

afin que s'accomplît le mot dit

Vce qui a été dit par les prophètes :

Il sera appelé « Nazoréen »

V« Nazaréen ».

3,1 En ces jours-là survient

Vvint Jean le Baptiste

VJean-Baptiste, proclamant

Vprêchant dans le désert de Judée

3,2 et disant :

Repentez-vous

VFaites pénitence, car le royaume des cieux s'est approché.

3,3 C'est lui en effet qui a été annoncé par le prophète Isaïe, disant :

« Voix de celui qui crie dans le désert : — Préparez le chemin du Seigneur ! Rendez droits ses sentiers ! »

3,4 Ce même Jean avait son 

Vun vêtement en poil de chameau

et une ceinture de cuir autour de ses reins

sa nourriture était des sauterelles et du miel sauvage.

3,5 Alors sortaient vers lui Jérusalem, toute la Judée et toute la région autour du Jourdain.

3,6 Et ils se faisaient baptiser

Vétaient baptisés  dans le S Nesfleuve du Jourdain par lui, en confessant leurs péchés.

3,7 Voyant beaucoup de pharisiens et de sadducéens

VSadducéens venir au baptême

Và son baptême

Sse faire baptiser, il leur dit :

— Engeance de vipères, qui vous a montré comment fuir devant la colère qui vient ?

3,8 Faites donc un fruit digne

TRdes fruits dignes du repentir

Vde la pénitence.

3,9 Et ne prétendez pas dire en vous-mêmes : Nous avons pour père Abraham

car je vous dis que Dieu peut, de ces pierres, susciter des enfants à Abraham.

3,10 Déjà,

SEt voici, la hache est posée à la racine des arbres

tout arbre donc qui ne fait pas de bon fruit est coupé et jeté au feu.

3,11 Pour moi, je vous baptise dans l’eau pour le repentir

Vla pénitence

mais celui qui vient derrière moi est plus fort que moi

[lui] dont je ne suis pas digne de porter les sandales

lui-même vous baptisera dans l’Esprit-Saint et le feu.

3,12 Il a la pelle à vanner

Vle van dans sa main

et il purifiera

Vnettoiera son aire

et il rassemblera son blé

Vfroment dans le grenier ;

quant aux bales, il les brûlera dans le feu qui ne s'éteint pas.

3,13 Alors survient

Vvint Jésus de la Galilée au Jourdain auprès de Jean, pour être baptisé par lui.

Byz S TR Nes
V

3,14 Mais Jean voulait l'en empêcher en disant :

— C’est moi qui Byz S TR Nesai besoin d’ être baptisé par toi

et c'est toi qui viens à moi !

14 Mais Jean l'en empêchait en lui disant :

— C’est moi qui dois être baptisé par toi

et c'est toi qui viens à moi !

Byz V S TR Nes

3,15 Mais Jésus, répondant, lui dit :

— Laisse [faire] maintenant

car c'est ainsi qu'il convient que nous accomplissions toute justice.

Alors il le laisse 

Vlaissa [faire].

3,16  Baptisé, Jésus

Vil monta aussitôt de l’eau

et voici, les cieux lui furent ouverts

et il vit l’Esprit de Dieu descendant comme une colombe

et venant sur lui.

3,17 Et voici une voix des cieux qui disait :

— Celui-ci est mon Fils, le Bien-aimé, en qui je me suis complu.

4,1 Alors Jésus fut conduit en haut 

Vconduit dans le désert par l’Esprit SSaint pour être tenté par le diable.

Sl'accusateur.

Byz S TR Nes
V

4,2 Il jeûna quarante jours et quarante nuits ; après quoi il eut faim.

Alors qu'il avait jeûné quarante jours et quarante nuits, après cela, il eut faim.

Byz V S TR Nes

4,3 Et s'approchant Byz TRde lui, le tentateur V S Neslui dit :

— Si tu es Fils de Dieu, dis que ces pierres deviennent des pains.

4,4 Répondant, il dit :

— Il est écrit :

« Ce n'est pas de pain seul que l'homme vivra, mais de toute parole sortant par

Vqui sort de la bouche de Dieu. »

Contexte

Repères historiques et géographiques

2,1–23 Bethléem (Voir Repères historiques et géographiques 1S 16,4). ou Éphrath, Éphrata. Une ville qui appartenait à la tribu de Juda (1Ch 2,51) , située à 10 kilomètres au sud de Jérusalem. Le roi David et Jésus y sont nés.

Pères blancs de Ste-Anne, Le parvis de la basilique de la Nativité, photographie, vers 1930

Sainte-Anne, Jérusalem (Ste A-Cont.407)

© Couvent St-Étienne de Jérusalem — É.B.A.F. 1S 16,4 

Le parvis de la basilique de la Nativité, dans son état ancien, avec les gros pavés. Le monument byzantin est à l’arrière-plan : la façade orientale, les contreforts ajoutés après-coup et les entrées dans le monument rétrécies en trois moments. À droite, le couvent arménien.

Récit biblique

  • Rachel mourut en mettant au monde Benjamin sur la route de Béthel, à Bethléem. Son mari Jacob l'enterra sur place (Gn 35,16-19). 
  • Les Lévites habitaient à Bethléem (Jg 17,7). 
  • Élimélek et Noémi, les beaux-parents de Ruth, étaient de Bethléem avant qu'ils ne s'installent à Moab (Rt 1,2). Après la mort de son mari et de ses fils, Noémi y revint avec Ruth, qui finit par épouser Booz, un parent d'Élimélek (Rt 4,13). Leur fils, nommé Obed, est le grand-père de David (Rt 4,22).
  • Suivant l'ordre de Dieu, Samuel oignit David à Bethléem (1S 16,13). 
  • Après l'attaque de David contre les Philistins, ceux-ci se retirèrent à Bethléem. Trois des soldats de David se frayèrent un passage à travers le camp des Philistins pour ramener de l'eau du puits de la porte de Bethléem (2S 23,14-15). 
  • La ville appartenait à la tribu de Juda (1Ch 2,51). 
  • Roboam, le petit-fils de David, fortifia la ville (2Ch 11,6). 
  • Le prophète Michée déclara que le futur souverain d'Israël sortirait de Bethléem (Mi 5,1). 
  • 123 habitants de Bethléem furent répertoriés parmi ceux qui rentrèrent de l'Exil au 4e s. av. J.-C. (Esd 2,21) et retrouvèrent leur ancienne maison.
  • La famille de Joseph était de Bethléem (Lc 2,4) et Jésus y est né (Mt 2,1-8 ; Jn 7,42). 

Traditions interprétatives

  • À partir du 6e s. ap. J.-C., la tradition chrétienne considéra que l'étoile des mages était tombée dans le puits de l'église (Adamnan Loc. sanct. v.256 ; Ps.-Épiphane le Moine Enarr. Syr. 11).
  • À la fin du 7e s. ap. J.-C., on montrait aux pèlerins un rocher situé à l'extérieur des murs de la ville. On disait alors que l'eau du premier bain de Jésus y avait été versée et qu'il été rempli d'eau depuis (Adamnan Loc. sanct. v.256).
  • La tradition chrétienne byzantine localisa le tombeau de diverses figures bibliques à Bethléem. Eusèbe de Césarée Onom. 15v, s. 'Bethleem' écrit que les tombeaux d'Isaïe et de David étaient visibles dans la ville ; Pèl. Bordeaux a également vu les tombeaux du prophète Ézéchiel, Asaph, Job et Salomon à Bethléem. Égérie Itin. L1 écrit que les tombeaux des rois de Juda étaient situés dans une vallée de Bethléem. Au cours du 6e s. ap. J.-C., Pèl. Piacenza V178 précise que les tombes de David et de Salomon étaient situées dans la banlieue de Bethléem, non loin du centre-ville. Il mentionne également une basilique dédiée à saint David. À l'époque d'Adamnan, l'église se trouvait toujours sur l'emplacement supposé de la tombe de David (Adamnan Loc. sanct. 4,1). La tradition chrétienne, en plaçant la tombe de David à Bethléem, entra en concurrence avec la tradition juive qui la situe à Jérusalem.
  • Ps.-Épiphane le Moine (Enarr. Syr. 11) rapporte que la maison familiale du roi David était visible à gauche de l'église de la Nativité.
  • La tradition byzantine a également localisé les tombeaux des Saints Innocents à Bethléem (LAR 55 ; Pèl. Piacenza V178).
  • Jérôme rapporta qu'il avait enterré sainte Paula à côté de la grotte (Jérôme Ep. 108) ; sa propre tombe fut identifiée à proximité et montrée aux pèlerins ultérieurs (Pèl. Piacenza v178).

Autres sources écrites

Histoire du site d'après des historiens anciens, les sources chrétiennes et talmudiques

  • Après avoir réprimé la révolte de Bar Kochba en 135 ap. J.-C., l'empereur Hadrien expulsa les Juifs de Judée, y compris de la région de Bethléem (Tertullien Jud. 13,3 ; Lam. Rab. 1,15).
  • Entre les règnes d'Hadrien et de Constantin, le site était un lieu cultuel dédié à Tammuz / Adonis (Jérôme Ep. 58).
  • En 384, Jérôme s'établit à Bethléem puis fut rejoint deux ans plus tard par Paula et sa fille Eustochium. Ensemble, ils transformèrent Bethléem en un centre monastique majeur (Jérôme Ep. 108).
  • L'impératrice Eudocia fit construire un palais à Bethléem (Vita Bars. 121).
  • Selon Eutychius d'Alexandrie (Jauhar 17,3), après le soulèvement samaritain de 529 ap. J.-C., l'empereur Justinien voulait que l'église soit reconstruite dans un style magnifique. Cependant, insatisfait et déçu des choix faits par l'architecte, il le fit exécuter. L'église de la Nativité a traversé les âges, même si elle a été modifiée et agrandie au fil des siècles.
  • Selon une lettre synodale envoyée après le concile de Jérusalem de 836, les Perses épargnèrent l'église en 614 car les mages représentés sur les mosaïques de la façade portaient le sarrau de prêtres zoroastriens (Bayet 1879, 77).
  • Eutychius d'Alexandrie (Jauhar 18, « Le califat d'Omar » 7) écrit que le calife Omar avait visité l'église et avait prié à l'intérieur du transept sud orienté vers La Mecque. Il publia un document officiel autorisant les musulmans à y prier mais leur interdisant de modifier quoi que ce soit à l'intérieur de l'église. Eutychius poursuit en affirmant que les musulmans contrevinrent, plus tard, à l'édit d'Omar, en détruisant les mosaïques et en transformant l'ensemble du transept en mosquée.
  • L'historien du 13e s., Yāqūt al-Hamawī (Mu‘ğam al-buldān 779 ; voir Le Strange 1890, 300) rapporte également que le calife Omar avait épargné l'église mais en avait transformé le transept sud en mosquée. Il ne mentionne aucun document officiel réglementant l'utilisation du bâtiment.
  • Bethléem fut l'une des premières villes conquises par les croisés en 1099 (Guillaume de Tyr Hist. 8,24). Le clergé occidental y établit un nouveau monastère : il s'installa dans la partie nord de l'église, tandis que le clergé local se plaça dans la partie sud. L'église fut érigée en cathédrale et les deux premiers rois de Jérusalem y furent couronnés.

Sources archéologiques

  • L'église actuelle de la Nativité est le résultat de 1700 années de modifications successives depuis l'époque de Constantin.
  • L'église constantinienne était une basilique carrée dotée de quatre rangées de neuf colonnes. La basilique était divisée en une nef avec deux nefs de chaque côté, toutes pavées de mosaïques. À l'extrémité orientale de la basilique, une structure octogonale a été construite sur la grotte de la Nativité. Deux chambres rectangulaires reliaient l'octogone à l'église principale ; elles étaient également pavées de mosaïques. À l'intérieur de l'octogone se trouvait une structure octogonale plus petite qui fermait l'ouverture de la grotte et avait un sol en mosaïque élaboré.
  • Au cours du 6e s. ap. J.-C., une tentative de remplacement de l'octogone par un bâtiment arrondi échoua et une triple abside en trèfle fut érigée à la place. L'ensemble du bâtiment a été modifié : il a gagné en longueur, la nef a été élargie, l'atrium a été étendu à l'ouest, un narthex a été ajouté et l'église a été fortifiée. Deux entrées de la grotte ont été faites sur les côtés nord et sud de l'abside et équipées de portes en bronze.

Pères blancs de Ste-Anne, Le narthex de la basilique de la Nativité, photographie, vers 1930

Sainte-Anne, Jérusalem (Ste A-Cont.409)

© Couvent St-Étienne de Jérusalem — É.B.A.F.

Le narthex de la basilique de la Nativité. Au centre droit, une des belles colonnes monolithes byzantines ; juste derrière elle, sur sa droite, l’escalier de la sortie de la grotte de la Nativité, sous le chœur des Grecs. À gauche, au premier plan, un autel latéral arménien.

  • L'église a été rénovée par les croisés, qui ont bloqué les deux entrées latérales et réduit la taille de la principale. Une porte en bois fut sculptée. L'église était richement décorée de peintures et de mosaïques. Elles représentent des scènes du Nouveau Testament, la généalogie de Jésus selon les évangiles de Matthieu et de Luc, des anges, les décisions des sept conseils œcuméniques et des six conseils provinciaux qui ont été reconnues par les Églises orientale et méridionale. Des représentations de saints décoraient les parties supérieures des piliers.

La grotte de la Nativité

  • Bien que les évangiles ne mentionnent pas le fait que Jésus soit né dans une grotte, cette tradition s'est répandue très tôt, probablement parce qu'il y a effectivement des grottes dans la région de Bethléem. Les premières déclarations concernant la grotte de la Nativité se trouvent dans les écrits de Justin le Martyr Dial. 78,5 ainsi que dans le Protév. Jc. 18,1 du 2e s. av. J.-C. Plus tard, elles furent reprises par Origène Cels. 1,51,  Jérôme Ep. 58 et Jérôme Ep. 108, V316, 84. Cette grotte est accessible à partir de l'église de la Nativité. Elle est reliée à plusieurs autres grottes que la tradition identifie à l'étude de Jérôme, ainsi qu'à son tombeau. Il est dit que sainte Paule et sainte Eustochium y sont également enterrées.

Pères blancs de Ste-Anne, La Grotte de la Nativité, photographie, vers 1930

Sainte-Anne, Jérusalem (Ste A-Cont.404)

© Couvent St-Étienne de Jérusalem — É.B.A.F.

À l’intérieur de la basilique, dans la crypte, l’emplacement de la grotte de la Nativité. Ce cliché original montre deux policiers municipaux du mandat britannique montant la garde devant l’autel sous lequel se trouve la célèbre étoile en argent, lieu traditionnel de la naissance de Jésus, et objet de la vénération liturgique des trois communautés chrétiennes y ayant un droit d’accès : Grecs, Arméniens et Catholiques.

Réception

Arts visuels

2,1 voici, des mages d'Orient vinrent à Jérusalem L'Épiphanie selon la Biblia Pauperum La visite des mages est au centre ; les images latérales représentent le roi David et le roi Salomon. Celui qui est « Roi des rois et Seigneur des seigneurs » (Ap 19,16) surprend par sa petitesse, en comparaison des rois d'Israël qui le flanquent. 

Anonyme (continuant Albrecht Pfister), « Abner, chef de l'armée de Saül, se rend chez David, l'Épiphanie, La reine de Saba se rend chez Salomon », (impression xylographique, 1460s, Pays-Bas ou Rhin inférieur), 27,5 x 20,5 cm 

Planche C, f.3v de Biblia pauperum seu historiæ Veteris et Novi Testamenti, Bibliothèque nationale de France→,

© Domaine public→

Registre supérieur

Lectures
  • à g. On lit au deuxième livre des Rois, au chapitre 3, qu'Avner, le chef de l'armée de Saül, vint trouver David à Jérusalem pour qu'il ramène à lui tout le peuple d'Israël qui s'était alors attaché à la maison de Saül. Ce qui figurait la venue des Mages auprès du Christ, qui adoraient le Christ avec des présents mystiques (cf. 2S 3).
  • à dr. On lit au troisième livre des Rois, au chapitre 10, que la Reine de Saba, ayant appris la renommée de Salomon, vint à Jérusalem avec de grands présents pour l'adorer, elle qui était une reine paienne. Ce qui figurait bien les peuples paiens venus de loin adorer le Seigneur avec des présents (cf. 1R 10).
Prophètes
  • à g. David : « Les rois de Tarsis et les îles offriront des présents » (Ps 72,10).
  • à dr. Isaïe : « Et ils adoreront les traces de tes pas » (Is 60,14).

Triptyque central et distiques afférents

Panneau central
  • L'Épiphanie (Mt 2)
  • Distique central : « Le Christ est adoré : l'or, l'encens, la myrrhe sont déposés. »
Panneau gauche
  • Avner, chef de l'armée de Saül, se rend chez David (2S 3)
  • Distique gauche : « Ce peuple désigne les paiens | désireux de s'attacher au Christ. »
Panneau droit
  • La Reine de Saba se rend chez Salomon (1R 10)
  • Distique droit : « Celle-ci, de manière figurée, désigne | les païens venant au Christ. »

Prophètes inférieurs

  • à g. Isaïe : « Vers lui afflueront tous les païens et des peuples nombreux viendront » (Is 2).
  • à dr. Balaam : « Une étoile se lèvera de Jacob et un rameau surgira de la racine » (Nb 24).

Commentaire de l'Épiphanie selon la Biblia Pauperum

David et Salomon, sceptre en main et couronne sur la tête, encadrent l'Épiphanie. Ils se distinguent de Jésus qui n'est pas assis sur un trône à baldaquin, mais sur les genoux de Marie. Celle-ci tient délicatement entre ses mains celui qu'annoncent les paroles d'Isaïe dans le phylactère au-dessus : « Et ils adoreront les traces de tes pas » (Is 60,14).

L'étoile
  • Dans l'image centrale, l'un des mages pointe du doigt le coin supérieur droit où figure une étoile, tandis que les coins équivalents des images adjacentes restent vides, bien que les deux sceptres pointent dans la même direction. L’Astre désiré depuis des générations se manifeste enfin en Jésus à Bethléem.
  • Une étoile véritable resplendit dans les cieux, des étoiles brodées de main humaine ornent le baldaquin de Salomon. À la fois préfiguration et contraste, l'une est dans le firmament des cieux tandis que les autres sont sur la tenture d'un roi terrestre. Pourquoi l'imagier place-t-il des étoiles sur le trône de Salomon et non sur celui de David ? L'un des titres les plus utilisés pour Jésus est celui de « fils de David » : Salomon, fils de David est donc son type par excellence : Tradition chrétienne Mt 12,42. D'autre part, les étoiles sont placées sur le baldaquin de Salomon étant donné qu'il est considéré comme un magicien et un astrologue : Tradition juive 1R 5,9–14.
Roi et rois
  • De même, les couronnes que portent sur la tête les rois d'Israël contrastent avec la couronne de l'Épiphanie posée à terre. Le premier roi-mage s'est découvert et fait son offrande ; derrière lui les deux autres attendent de faire de même. Ces couronnes déposées au pied de l'enfant témoignent de la reconnaissance des rois terrestres envers le roi céleste.
  • Les émissaires ne sont plus agenouillés devant un roi, une couronne, un sceptre et un trône, mais face à Dieu fait homme : Jésus, petit enfant. Son royaume n'est pas de ce monde : nouveau-né vêtu de langes, intrônisé dans le giron de sa mère, elle-même surélevée sur une estrade, il manifeste une souveraineté vraiment absolue : la coupe qu'il touche de ses mains se différencie de celle présentée à Salomon : plus qu'un simple ciboire, sa forme sphérique l'apparente à  l'orbe de la terre (Littérature Sg 1,14) : c'est lui le roi de l'univers. 

2,11b se prosternant l'adorèrent L'adoration des mages

5e s.

L’épisode de la visite des mages est la première à frapper l’imagination des artistes, qui la représentent selon un modèle assez vite standardisé : suivant l’étoile dans la direction de Marie et de son fils qui attendent leurs exotiques visiteurs, ils marchent en procession rythmique.

Anonyme, Adoration des mages (fresque, 3e-4e s. ap. J.-C.), peinture murale, au-dessus d'une arche

Catacombe de Priscille, Capella Graeca, Rome (Italie) © Collection personnelle→

C'est la première attestation du nombre des mages : Matthieu mentionnant trois types d'offrandes, il semble qu'on en déduisit qu'elles étaient portées par trois personnes.

Les mages occupent le plus d’espace dans la composition, sur l’axe central au sommet de l’arc : le spectateur est pris dans leur mouvement de recherche intense du Fils. La mise en scène fait entrer le spectateur dans un récit de quête et de découverte, dont il devient participant — adorant Dieu fait enfant — en s’appropriant les attitudes des personnages.

Les postures d’offrande et de réception de dons abondent dans l’art gréco-romain ancien et le choix des offrandes informe sur l’identité du donateur aussi bien que du destinateur.

L’attitude rappelle celle du culte de l’empereur dans les cérémonies impériales.

Dans leurs célébrations et prédications, les Églises locales semblent s’être diversement concentrées sur les évangiles de Matthieu et de Luc. La popularité du thème des Rois mages dans l’art, avant celui de la mangeoire, peut être un signe d’une préférence pour Matthieu plutôt que Luc, mais pourrait tout simplement venir de sa capacité de synthétiser les deux récits et même de faire allusion au prologue de Jean.

À Rome, les évangiles de Luc et de Jean sont préférés pour Noël. Dans la mosaïque de Sainte-Marie Majeure, les Mages arrivent devant un enfant et sa mère, impériaux, sans présence d’aucun des bergers du récit lucanien.

Anonyme, Adoration des mages (mosaïque, ca. 435), arc triomphal, côté gauche, deuxième registre à partir du haut

Basilique Santa Maria Maggiore, Rome (Italie) © CC-BY-SA 3.0→

Sur la mosaïque de Sainte-Marie-Majeure, les Mages arrivent devant un enfant et sa mère impériaux, sans la présence d’aucun des bergers du récit lucanien.

6e s.

Anonyme Adoration des mages (mosaïque, 6e s.), mur gauche de la nef

église Saint-Apollinaire-le-Neuf, Ravenne (Italie) © CC-BY-SA 4.0→

15e s. flamand

Intégré parmi d'autres scènes

Dierick Bouts (ca. 1420-1475), Tryptique de la Dernière Cène (huile sur panneau, 1464-1468), 185 × 294 cm

Musée de Louvain (Belgique) © Domaine public→

15e s. italien

Gentile da Fabriano (ca. 1370-1427), L'adoration des mages (tempera sur panneau, 1423), 301,5 x 283 cm

Galerie des Offices, Florence (Italie) © Domaine public→

Fresques de Florence

Chez Fra Angelico comme chez Gozzoli, à Florence, le plus jeune roi mage prend les traits de Laurent le Magnifique.

Fra Angelico (ca. 1395-1455), L'adoration des rois mages (fresque, 1438-1446)

Musée national San Marco, Florence (Italie) © Domaine public→

Enluminure du 15e s. 

Jean Fouquet (1420-), L'adoration des rois mages (enluminure sur parchemin, ca. 1452-1460), 21 x 15 cm

Heures d'Étienne Chevalier, Bibliothèque Condé © Domaine public→

16e s.

Pieter Bruegel l'Ancien (ca. 1526-1569), L'adoration des Rois (huile sur bois, 1564), 111,1 x 83,2 cm

National Gallery, Londres (Royaume-Uni) © Domaine public→

CONTEMPLATION Dans les Flandres renaissantes : l’Épiphanie dans la blancheur du silence 

Pieter Bruegel l’Ancien (1525-1565), L’Adoration des mages sous la neige (huile sur panneau, 1567), 35 × 55 cm

Musée Oskar Reinhart « Am Römerholz », Winterthur (Suisse) © Domaine public→

La scène est située dans un village des Flandres sous la neige, un univers bien connu du peintre. À l’écart sur la gauche du tableau, dans une pauvre masure au toit prêt à s’écrouler, Marie présente son enfant ; Joseph dans l’ombre regarde, les deux Mages se prosternent devant elle, le troisième est avec le petit groupe qui s’avance.

Rien ne brille. Même pas les offrandes divines, masquées par la neige ou les lourds manteaux bruns. Il faut une loupe pour discerner la scène, humble et modeste, microcosme d’un événement qui va bouleverser le cours de l’histoire de l’humanité.

Jésus se donne à voir à ceux qui le cherchent, cette présence ne se perçoit pas à l’œil nu. Pour les villageois affairés, c’est un jour banal. Pour découvrir cet enfant, il faut  marcher, passer par ce monde enneigé, où le quotidien devient le lieu de la rencontre : c’est là au milieu des gens « comme les autres » que Bruegel invite le contemplateur de son petit tableau à accueillir l’ordinaire de la vie pour être conduit au seuil du mystère.

Il faut aiguiser son regard pour voir Celui qui humblement se donne à vivre, écouter le silence de cette Épiphanie ; laisser fondre la neige du cœur pour voir fleurir le printemps de la vie… À chacun de découvrir dans la banalité de son propre quotidien les signes fragiles de Sa Présence… (Père J.-M. Nicolas)

17e s.

Rubens 

Pierre Paul Rubens (1577-1640), L'adoration des rois mages (huile sur toile, ca. 1617-1618), 328 × 251 cm

Musée des Beaux-Arts de Lyon (France) © Domaine public→

Nicolas Poussin 

Nicolas Poussin (1594-1665), L'Adoration des mages (huile sur toile, 1633), 160 × 182 cm

Gemäldegalerie Alte Meister, Dresde (Allemagne) © Domaine public→

Leonaert Bramer

Leonaert Bramer (1596-ca 1674), L'adoration des mages (huile sur panneau, 1628-1630), 43 x 53 cm

Detroit Institute of Arts, Detroit, MI (États-Unis) © Domaine public→

20e s.

George Desvallières (1861-1950), Roi Mage Balthazar (gouache sur papier, ca. 1926), 54 x 36 cm

Collection particulière, France © Succession Desvallières→

Un roi mage aux coloris de rêve bleu vient parler d’un mystère joyeux lors de l’exposition du deuxième groupe chez Druet au printemps 1926 aux côtés de grandes compositions graves remémorant la Grande Guerre. Par la suite, Desvallières proposa l’œuvre à l’exposition consacrée à son maître Gustave Moreau et ses élèves.

2,13 La fuite en Égypte selon la Biblia Pauperum Dans la Biblia pauperum, cette planche marque le début d'un deuxième volet.

Les planches A à D formaient un premier groupe couvrant l'Annonciation jusqu'à la première souffrance du Christ (sa circoncision).

Les planches E à H forment un deuxième groupe, délimité par la fuite en Égypte et le retour d'Égypte. La deuxième souffrance du Christ se distingue de la circoncision dans la mesure où le danger est représenté. Alors que dans la Présentation de Jésus au Temple, seule la nudité de Samuel suggérait la circoncision (Arts visuels Lc 2,22–39), le danger est ici manifeste. Que ce soit à travers Ésaü et son arc (signe distinctif qui réapparaît sur la Planche K : Arts visuels Lc 4,4), l'âne en mouvement ou les fantassins qui pourchassent David, cette page est marquée par le danger et la fuite.

Anonyme (continuant Albrecht Pfister), « Fuite de Jacob, La fuite en Égypte, Fuite de David pourchassé par Saül », (impression xylographique, 1460s, Pays-Bas ou Rhin inférieur), 27,5 x 20,5 cm

Planche E, f.5v de Biblia pauperum seu historiæ Veteris et Novi Testamenti, Bibliothèque nationale de France→,

© Domaine public→

Registre supérieur

Lectures
  • à g. On lit dans la Genèse, au chapitre 27, que lorsque Rébecca, la mère d'Esaü et Jacob, apprit qu'il pourrait arriver d'un moment à l'autre que Jacob fût tué, elle fit partir son fils Jacob de son pays vers un pays étranger afin qu'il échappât au meurtre. Ce qui figurait bien la fuite du Christ au pays d'Égypte quand Hérode le chercha alors qu'il venait de naître, pour le faire mettre à mort (Gn 27).
  • à dr. On lit au premier livre des Rois, au chapitre 19, que le roi Saül envoya des gardes pour rechercher David afin de le tuer. Mais la femme de David, du nom de « Mikal », le fit descendre par une fenêtre à l'aide d'une corde et c'est ainsi qu'il échappa à ceux qui le recherchaient. Le roi Saül signifie Hérode qui rechercha le Christ pour le faire mettre à mort lorsque Joseph l'emmena avec Marie en Égypte et c'est ainsi qu'il échappa aux mains [de ceux] qui le recherchaient (1S 19).
Prophètes
  • à g. Isaïe : « Voici que le Seigneur entrera en Égypte et les idoles seront ébranlées » (Is 19,1).
  • à dr. David : « Voici que je me suis éloigné en fuyant et je suis demeuré dans la solitude » (Ps 55,8).

Triptyque central et distiques afférents

Panneau central
  • La fuite en Égypte (Mt 2)
  • Distique central : « À la funeste colère d'Hérode échappe le Christ enfant ».
Panneau gauche
  • Distique gauche : « Jacob, par crainte de [son] frère | abandonna la maison paternelle ».
Panneau droit
  • Fuite de David pourchassé par Saül (1S 19)
  • Distique droit : « David, grâce à Mikal | évita les pièges de Saül contre lui ».

Prophètes inférieurs

  • à g. Jérémie : « J'ai laissé ma maison et abandonné mon habitation » (Jr 12,7).
  • à dr. Osée : « Ils iront chercher le Seigneur et ils ne le trouveront pas » (Os 5,6).

Commentaire de la fuite en Égypte selon la Biblia Pauperum

Enchâssée entre la fuite de Jacob et l'évasion de David, la fuite en Égypte fait partie des épreuves que Joseph, Marie et Jésus doivent endurer. Les agresseurs, absents de la scène centrale, sont présents dans les images latérales. 

Détails remarquables
  • Sur l'image de droite, les troupes de Saül se massent à l'entrée d'une forteresse, tandis que le roi David, assuré par sa femme Mikal, s'enfuit en rappel. On le reconnaît grâce à sa tenue et à son chapeau, identiques à ceux qu'il porte en tant que prophète sur la partie supérieure droite de la planche. Chaque prophète a en effet une tenue et un chapeau qui lui sont propres ! On reverra David porter ce même chapeau dans l'image gauche de la planche H lors de son retour après la mort de Saül, mais aussi lors de sa bataille avec Goliath dans l'image gauche de la planche •H•. De plus, à chaque fois qu'il apparaît en tant que prophète, il porte ce même chapeau.
  • Le motif du bâton apparaît dans les images de gauche et du centre : David et Joseph s'en servent pour porter leur frêle bagage constitué en tout et pour tout d'une modeste pièce de tissu. Peut-être fait-il écho du bâton de Moïse durant l'Exode, à la sortie d'Égypte ? Dans une visée typologique, ces deux images ont en commun le désert comme paysage. La continuité du relief en arrière-plan les place d'ailleurs dans le même décor, concrétisant l'unité profonde de l'histoire sainte.
  • On note une différence majeure entre l'image centrale et les deux images latérales : si, dans l'Ancien Testament, la fuite impliquait une séparation (Jacob quittant père et mère et David s'éloignant de Mikal), elle se place sous le signe de la communion exemplaire de la Sainte Famille dans le Nouveau Testament. 

2,16 il envoya tuer tous les enfants qui étaient dans Bethléem et de toute sa région Le massacre des innocents selon la Biblia Pauperum Première planche où Marie n'est pas représentée, elle apparaît toutefois en typologie, sous les traits de Josaba, fille de Joram, qui soustrait Joas pour le remettre à la nourrice (panneau droit).

Anonyme (continuant Albrecht Pfister), « Massacre des prêtres de Nov par Saül, Le massacre des innocents, Massacre de la descendance royale par Athalie », (impression xylographique, 1460s, Pays-Bas ou Rhin inférieur), 27,5 x 20,5 cm

Planche G, 7v de Biblia pauperum seu historiæ Veteris et Novi Testamenti, Bibliothèque nationale de France→,

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Registre supérieur

Lectures
  • à g. On lit au premier livre des Rois, au chapitre 22, que le roi Saül fit tuer tous les prêtres du Seigneur à Nov parce qu'ils avaient accueilli David qui fuyait et qu'ils lui avaient donné à manger du pain sanctifié. Saül signifie Hérode; David signifie en fait le Christ, et les prêtres, les enfants innocents qu'Hérode fit tuer à cause du Christ.
  • à dr. On lit au quatrième livre des Rois, au chapitre 11, que la reine Athalie, en voyant son fils mort, fit tuer tous les fils du roi afin qu'ils ne règnent pas à la place de leur père. Mais alors la sœur du roi [parvint à] soustraire le plus jeune fils qui plus tard devint roi. La cruelle reine signifie Hérode qui, à cause du Christ, fit tuer les enfants. Et l'enfant soustrait à la mort figure le Christ secrètement arraché au massacre du roi Hérode.
Prophètes
  • à g. David : « Venge, Seigneur, le sang de tes serviteurs qui fut versé » (Ps 79,10).
  • à dr. Proverbes : « Un lion rugissant et un ours affamé, tel [est] un prince impie sur un peuple pauvre » (Pr 28,15).

Triptyque central et distiques afférents

Panneau central
  • Le massacre des innocents (Mt 2)
  • Distique central : « Ceux-ci, à la place du Christ, à ce monde ont été enlevés ».
Panneau gauche
  • Massacre des prêtres de Nov par Saül (1S 22)
  • Distique gauche : « Saül, à cause de David | mit à mort les oints du Seigneur ».
Panneau droit
  • Massacre de la descendance royale par Athalie (2R 11)
  • Distique droit : « Par un seul [qui fut] enlevé | une descendance royale secrètement est donnée ».

Prophètes inférieurs

  • à g. Jérémie : « Une voix de pleurs et de gémissements a été entendue à Rama » (Mt 2,18)
  • à dr. Osée : « Ils ont régné par eux-mêmes et non par moi » (Os 8,4).

Commentaire du massacre des innocents selon la Biblia Pauperum

Les massacres des prêtres de Nov et de la descendance royale par la reine Athalie présentent des ressemblances typologiques. À travers l'assassinat des prêtres oints (messies), c'est le Messie que l'on cherche à atteindre. De même, Joas, qui a été soustrait aux mains d'Athalie pour rester en vie auprès de sa nourrice, représente le Christ. Bien qu'il ne soit pas cité dans la généalogie selon saint Matthieu, Joas est l'un des maillons de la promesse faite à David : « l'enfant soustrait à la mort figure le Christ secrètement arraché au massacre du roi Hérode » (Lectio Droit). 

Détails remarquables
  • Dans chacune des images, un mouvement diagonal va de la partie supérieure gauche à la partie inférieure droite : sur l'image centrale, Hérode pointe une mère en pleurs du bout de son sceptre ; le roi Saül désigne un prêtre de la même manière dans l'image de gauche, tandis qu'à droite, le bras gauche d'Athalie est au-dessus de la prochaine victime à exécuter. La position de son bras est d'ailleurs identique à celle des épées des autres images faisant écho aux glaives sanglants. 
  • Si les images de gauche et du centre sont en apparence saturées et confuses, chacune étant dominée par un roi, l'image de droite apporte de l'ordre et de l'harmonie à travers les deux femmes couronnées. Du chaos au cosmos, la symétrie est visible dans les deux enfants gisant à terre, ainsi que dans l'arrière-plan où l'on retrouve les deux femmes (Athalie et Josaba) : l'une évoque le crime, l'autre la Vierge à l'enfant.

2,19–23 va en terre d'Israël  La Sainte Famille revient d'Égypte selon la Biblia Pauperum Le Retour d'Égypte revêt ici une grande importance : il marque à la fois la fin du thème comprenant la Fuite en Égypte et le Retour (planches E à H), et plus largement celui de l’Enfance du Christ (planches A à H), qui représente un cinquième de l’ensemble de l'œuvre.

Anonyme (continuant Albrecht Pfister),  « Retour de David après la mort de Saül, La Sainte Famille revient d'Égypte, Retour de Jacob au pays de Canaan », (impression xylographique, 1460s, Pays-Bas ou Rhin inférieur), 27,5 x 20,5 cm

Planche H, f.8r de Biblia pauperum seu historiæ Veteris et Novi Testamenti, Bibliothèque nationale de France→,

© Domaine public→

Registre supérieur

Lectures
  • à g. On lit au deuxième livre des Rois, au chapitre 2, qu'après la mort du roi Saül, David consulta le Seigneur qui lui répondit de revenir en terre de Juda. David signifie en fait le Christ qui, après la mort d'Hérode, revint en terre de Juda, comme l'atteste l'Évangile en disant: « l'Ange du Seigneur apparut: prends l'enfant et sa mère et va etc... car ils sont morts ceux qui en voulaient à la vie de l'enfant ».
  • à dr. On lit dans la Genèse, aux chapitres 31 et 32, que Jacob, retournant dans son pays d'où il avait fui par peur de son frère Esaü, fit passer devant lui les brebis et les bœufs, les chameaux et les ânes tandis que lui-même suivait avec femmes et enfants. Jacob qui fuyait son frère signifie le Christ, lui qui fuit le roi Hérode, signifié par Esaü, et, une fois Hérode mort, revint en terre de Juda.
Prophètes
  • à g. David : « Visite-nous, Seigneur, en ton salut ! » (Ps 106,4).
  • à dr. Osée : « Égypte, ne pleure pas: le Seigneur t'a prise en pitié ». (Os)

Triptyque central et distiques afférents

Panneau central
  • La Sainte Famille revient d'Égypte (Mt 2,19)
  • Distique central : « Il retourne vers les lieux saints, Jésus qui abandonne l'Égypte. »
Panneau gauche
  • Retour de David après la mort de Saül (2S 2)
  • Distique gauche : « Saül mort | dans [sa] patrie David retourna ».
Panneau droit
  • Retour de Jacob au pays de Canaan (Gn 31)
  • Distique droit : « Jacob brûle d'aller revoir [son] père | [mais] il redoute [son] frère ».

Prophètes inférieurs

  • à g. Osée : « D'Égypte j'ai appelé mon fils » (Os 11,1).
  • à dr. Zacharie : « Je reviendrai vers Jérusalem avec compassion » (Za 1,16).

Commentaire de La Sainte Famille revient d'Égypte selon la Biblia Pauperum

La planche consacré au retour d'Egypte est construit en miroir avec la planche consacré à la fuite. Contrairement à la fuite en Égypte (Arts visuels Mt 2,13), le retour dans la région de Galilée est marqué par le fait que Jésus est assez grand pour marcher. Prenant le chemin inverse de celui indiqué sur la planche E, la Sainte Famille est entourée, comme lors de la fuite, par David et Jacob. Seulement, ceux qui apparaissaient respectivement à gauche (Jacob) et à droite (David) lors de la fuite (planche E), apparaissent ici renversés, comme si le retour avait inversé leur position (David à gauche et Jacob à droite). 

Détails remarquables
  • Dans les trois panneaux de la Fuite en Égypte (planche E : Arts visuels Mt 2,13), le mouvement se fait de gauche à droite ; ici, il se fait de droite à gauche.
  • Le fait que Jésus se tient debout, le bâton à la main, symbolise le début de son autorité. De fait, dans l'image centrale, Joseph est à peine visible, laissant la place au Christ. Il est le petit hégémon, le guide, le nouveau Moïse.
  • Dans l'image de gauche, le Seigneur qui apparaît à David n'est autre que le Christ dans dans une lumière rayonnante. Cette apparition rappelle celle de l'Annonciation (planche A : Arts visuels Ps 72,6), du buisson ardent (planche B : Arts visuels Lc 2,1–7) et du veau d'or (planche F : Arts visuels Is 19,1).
  • Le retour de Jacob contraste avec sa fuite (Arts visuels Mt 2,13) puisqu'il revient entouré de sa famille et de son troupeau. En effet, il est non seulement accompagné de ses femmes et enfants, mais aussi de tous les biens qu'il a acquis : moutons, bovins, chameaux, ânes, et même, étrangement, des petits cochons ou des marcassins.

3,13 Alors vint Jésus de la Galilée au Jourdain auprès de Jean, pour être baptisé par lui La Baptême de Jésus selon la Biblia Pauperum Cette planche marque le début d'une nouvelle partie de la Biblia Pauperum. Après la petite enfance (planches A à D) et la fuite et le retour d'Égypte (planches E à H), le baptême de Jésus représente le début de son ministère. Il est enchassé entre deux épisodes de l'Exode.

Anonyme (continuant Albrecht Pfister),  « Le passage de la mer Rouge, Le Baptême de Jésus, L'exploration de la Terre promise », (impression xylographique, 1460s, Pays-Bas ou Rhin inférieur), 27,5 x 20,5 cm,

Planche I, f.9v de Biblia pauperum seu historiæ Veteris et Novi Testamenti, Bibliothèque nationale de France→,

© Domaine public→

Registre supérieur

Lectures
  • à g. On lit dans l'Exode, au chapitre 14, que Pharaon, en poursuivant les fils d'Israël avec chars et cavaliers, entra après les fils d'Israël dans la mer Rouge et que le Seigneur fit refluer sur eux les eaux de la mer. Et de même qu'il délivra son peuple de la main des ennemis qui [le] poursuivaient, de même à présent, par les eaux du baptême, sanctifiées par le Christ, il a délivré le peuple des chrétiens des liens du péché originel (Ex 14).
  • à dr. On lit au livre des Nombres, au chapitre 13, que les éclaireurs qui avaient été envoyés pour explorer la terre de la promesse, coupèrent à leur retour une grappe de raisins qu'ils portèrent sur une perche et, traversant le Jourdain, ils la rapportèrent en témoignage de la bonté de cette terre. Ce qui signifie que si nous voulons entrer dans le Royaume des cieux, il nous faut d'abord passer à travers les eaux du baptême (Nb 13).
Prophètes
  • à g.  Isaïe : « Vous puiserez les eaux dans la joie aux sources du Sauveur » (Is 12,3).
  • à dr. David : « Dans les assemblées, bénissez Dieu, le Seigneur des sources d'Israël » (Ps 67,27).

Triptyque central et distiques afférents

Panneau central
  • Le Baptême de Jésus (Mt 3)
  • Distique central : « Quand le Christ est baptisé le baptême est consacré ».
Panneau gauche
  • Le passage de la mer Rouge (Ex 14)
  • Distique gauche : « Les voilà engloutis, les ennemis | qui par le chemin de la mer s'avancent ».
Panneau droit
  • L'exploration de la Terre promise (Nb 13)
  • Distique droit : « Le fleuve est traversé | et le pays de miel abordé ».

Prophètes inférieurs

  • à g. Ézéchiel : « Je répandrai sur vous une eau pure » (Ez 26,25).
  • à dr. Zacharie : « En ce jour-là il y aura une source ouverte pour la maison de David » (Za 13,1)

Commentaire : Le Baptême de Jésus selon la Biblia Pauperum

Jusqu'à présent dans les planches où Dieu est rendu visible, il s'est montré sous la forme du Christ au nimbe crucifère, en tant qu'il parle et qu'il sauve. Dans le baptême, le Fils émerge du Jourdain, l'Esprit plane au-dessus de lui sous forme de colombe, et le Père apparaît discrètement derrière les rayons de lumière qui se dégagent de sa nuée. Le refus de représenter Dieu le Père est un lieu commun dans le monde latin médiéval. 

Détails remarquables
  • De la même manière qu'un ange était présent lors de l'Annonciation (Arts visuels Ps 72,6), un ange assiste au baptême de Jésus. Il se tient debout, comme un diacre, avec un linge, prêt à servir Jésus. Le baptême de Jésus est déjà représenté comme le sacrement que célébreront les églises : en témoigne aussi l'instrument qu'est l'aiguière entre les mains de Jean Baptise. 
  • Le thème de l'eau est présent dans les trois images : dans l'image de gauche, la mer Rouge engloutit les Égyptiens et sauve le peuple d'Israël ; dans l'image centrale, Jésus est au milieu les eaux du Jourdain ; tandis qu'à droite, l'eau est représentée par le torrent de la Grappe (V : Nb 13,24). L'imagier choisit le passage de la mer Rouge comme une analogie typologique. De même que ses eaux délivrèrent le peuple d'Israël des Égyptiens, de même les eaux du baptême délivrent les hommes du péché originel. Quant à la grappe de raisins, elle renvoie au baptême que le chrétien doit recevoir pour entrer dans le royaume des cieux. L'image de la grappe elle est aussi une préfiguration de la passion du Christ, elle rappelle le sang et l'Eucharistie. À travers la grappe, c'est l'huile des onctions, le pain de l'Eucharistie et le vin, autant d'allusions typologiques à la Passion () qui transparaissent.
  • Il faut garder à l'esprit que dans le Baptême de Jésus ce n'est pas lui qui est baptisé le jourdain lui-même. Jésus n'est pas purifié par le baptême, c'est les eaux du baptême qui sont  sanctifiées (Tradition chrétienne Mc 1,9).
  • L'imagier synthétise la →Typologie mosaïque.
  • Les deux images qui encadrent le baptême en sont des types : le passage de la mer Rouge est un type de la celebration du baptême et l'exploration de la terre promise est un type de l'entrée dans le royaume de Dieu, véritable terre promise qui se fait avec le sacrement du baptême. 
  • Les quatre tours en poivrière qui apparaissent en arrière-plan de l'image de droite sont également visibles en toile de fond sur l'image de gauche. S'agirait-il là d'une référence à la terre promise ?

Cinéma

1,18–2,19 Histoire de la Nativité Une intense poésie se dégage de ce film d'animation russe.

Mikhail Aldashin, Noël (мультфильм Михаила Алдашина), (film d'animation, 1997)

musique :  Johann Sebastian Bach, Concerto en D minor pour clavecin, BWV 1052 (Clavecin: Jim Long) ; L. van Beethoven, Symphonie No. 7 en A Major, Op. 92: II. Allegretto (Rafael Frühbeck de Burgos; Wyn Morris ; London Symphony Orchestra).

Prod. : Primoluz, Рождество © Licence YouTube standard, Mt 1,1-2,19 ; Lc 1,26-2,20

Le film Noël du réalisateur et artiste Mikhail Aldashin cherche à faire toucher au miracle de la naissance du Sauveur parmi les hommes. L'intrigue respecte le texte canonique, en y ajoutant bien des traits naïfs et émouvants tirés des récits apocryphes. Mikhail Aldashin est l'un des principaux réalisateurs du studio Pilot. Ses films ont remporté le succès dans de nombreux pays, dans divers festivals internationaux. Le film Noël, tourné en 1997 la même année, a reçu le prix de la meilleure réalisation et la première place dans une classification professionnelle au Festival panrusse d'animation de Tarus ; au Golden Fish International Film Festival à Moscou et de nombreuses autres récompenses.

La scène de l’appel des trois mages endormis dans le même lit et tirés de leur sommeil par un petit ange qui les touche du doigt vient directement d’un chapiteau du 12e s. de la cathédrale Saint-Lazare d’Autun, sculpté par maître Gislebertus : Arts visuels Mt 2,1s