La Bible en ses Traditions

Apocalypse 5,1–8,1

Byz V S TR Nes

Puis je vis dans la main droite de celui qui était assis sur le trône un livre écrit en dedans et en dehors

et scellé de sept sceaux.

Et je vis un ange puissant qui criait d’une voix forte :

— Qui est digne d’ouvrir le livre et de briser ses sceaux ? 

Byz V TR Nes
S

Et personne ni dans le ciel, ni sur la terre, ni sous la terre, ne pouvait ouvrir le livre ni le regarder.

...

Byz V Nes
S
TR

Et moi,

Nes[moi], je pleurais beaucoup parce que personne ne fut trouvé digne d’ouvrir le livre, ni de le regarder.

V même de le voir.

...

Et moi, je pleurais beaucoup parce qu’il ne se trouvait personne qui fût digne d’ouvrir, de lire le livre, ni de le regarder.

Byz V S TR Nes

Alors un des vieillards me dit :

— Ne pleure pas :

voici qu'il a vaincu, le lion de la tribu de Juda, le rejeton de David

[pour] ouvrir le livre et ses sept sceaux ! 

Et je vis et voici qu’au milieu du trône et des quatre animaux et au milieu des vieillards

un Agneau était debout : il semblait avoir été immolé

il avait sept cornes et sept yeux

qui sont les sept

Nes[sept] Esprits de Dieu envoyés par toute la terre.

Il vint et reçut S TRle livre de la main droite de celui qui était assis sur le trôneByz S TR Nes ;

quand

Vet comme il eut reçu

Vavait ouvert le livre

les quatre animaux et les vingt-quatre vieillards se prosternèrent devant l’Agneau

chacun tenant une harpe et des coupes d’or pleines de parfums qui sont les prières des saints.

Et ils chantaient

Vchantent un cantique nouveau en disant :

— Tu es digne de recevoir le livre et d’en ouvrir les sceaux

car tu as été immolé et tu nous as rachetés

Nesas racheté pour Dieu par ton sang

Byz S TR Nesdes hommes de toute tribu, langue, peuple et nation

Byz V TR Nes
S

10 et tu as fait d'eux,

TRde nous, pour notre Dieu, des rois

V Nesun royaume et des prêtres, et ils régneront

TRnous régnerons sur la terre.

10 ...

Byz V S TR Nes

11 Puis je vis et j’entendis autour du trône, des animaux et des vieillards, la voix d’une multitude d’anges 

et leur nombre était Byz S TR Nesdes myriades de myriades et des milliers de milliers

Byz V TR Nes
S

12 disant d’une voix forte :

— L’Agneau qui a été immolé est digne

de recevoir la puissance, la richesse

TR Nesrichesse

Vla divinité, sagesse, force

honneur, gloire et bénédiction.

12 ...

Byz V S TR Nes

13 Et toute créature qui est

Byz S TR Nestoutes les créatures qui sont dans le ciel, sur la terre, sous la terre

et dans la mer et toutes les choses qui s’y trouvent

je les entendis Byz Vtoutes qui disaient : — À celui qui est assis sur le trône et à l’Agneau

louange, honneur, gloire et puissance dans les siècles des siècles !

14 Et les quatre animaux disaient : — Amen !

et les vieillards

TRles vingt-quatre vieillards se prosternèrent et adorèrent celui qui vit aux siècles des siècles.

Vadorèrent.

6,1 Et je vis l’Agneau qui ouvrit le premier des sept sceaux

et j’entendis l’un des quatre animaux qui disait comme d’une voix de tonnerre : — Viens et vois !

V Nes— Viens !

TR— Viens, regarde

6,2 TR Neset vois ! Et je vis :

et voici un cheval blanc.

Celui qui le montait avait un arc

on lui donna une couronne

et il partit en vainqueur et pour vaincre.

6,3 Et quand il eut ouvert le deuxième sceau

j’entendis le deuxième animal qui disait : — Viens !

TR— Viens et regarde !

6,4 Et il sortit un autre cheval qui était roux.

Celui qui le montait reçut le pouvoir d’ôter la paix de la terre

afin que les hommes s’égorgeassent les uns les autres

et on lui donna une grande épée.

6,5 Et quand il eut ouvert le troisième sceau

j’entendis le troisième animal qui disait : — Viens et vois !

TR— Viens, regarde et vois !

Et voici

Byz S TR Nesje vis paraître un cheval noir.

Et celui qui le montait tenait à la main une balance

6,6 et j’entendis au milieu des quatre animaux comme une voix qui disait :

— Une mesure de blé pour un denier !

Trois mesures d’orge pour un denier !

Et : — Ne gâte pas l’huile et le vin !

6,7 Et quand il eut ouvert le quatrième sceau

j’entendis la voix du

Byzle quatrième animal qui disait : — Viens et vois !

Nes— Viens !

TR— Viens, regarde

6,8 Et

TR Neset vois ! Et je vis paraître

Vvoici  un cheval de couleur verdâtre

Vpâle.

Celui

VEt celui qui le montait se nommait « la Mort »

et l’Enfer le suivait.

On leur donna pouvoir sur la quatrième partie de la terre

pour faire tuer par l’épée, par la famine, par la mortalité et par les bêtes féroces de la terre.

6,9 Et quand il eut ouvert le cinquième sceau

je vis sous l’autel les âmes de ceux qui avaient été immolés

pour la parole

Vle verbe de Dieu et pour le témoignage Byzpour l'Agneau  qu’ils avaient eu à rendre.

6,10 Et ils crièrent d’une voix forte en disant :

— Jusqu'à quand, maître saint et véritable, ne feras-tu pas justice et ne redemanderas

Vréclameras-tu pas notre sang à ceux qui habitent sur la terre ?

6,11 Alors on leur donna à chacun une robe blanche

V TRdes robes blanches

et on leur dit de se tenir en repos encore un peu de temps

Byzun temps

jusqu’à ce que fût complet le nombre de leurs compagnons de service et de leurs frères qui devaient être mis à mort comme eux.

6,12 Et je vis quand il eut ouvert le sixième sceau

qu’il se fit un grand tremblement de terre

et le soleil devint noir comme un sac de crin

la lune entière 

TRla lune parut comme du sang

6,13 et les étoiles du ciel tombèrent vers

Vsur la terre

comme les figues non encore mûres tombent d’un figuier secoué par un gros vent.

Vle figuier projette ses figues encore pas mûres lorsqu'il est secoué par un grand vent. 

6,14 Et le ciel se retira comme un livre qu’on roule

et toutes les montagnes et les îles furent remuées de leur place.

6,15 Et les rois de la terre et les grands et les généraux

et les riches et les puissants et tout esclave ou

Vet homme

TRtout homme libre

se cachèrent dans les cavernes et les rochers des montagnes

6,16 et ils disaient aux montagnes et aux rochers : — Tombez sur nous

et dérobez-nous à la face de celui qui est assis sur le trône et à la colère de l’Agneau

6,17 car il est venu le grand jour de sa

V Nesleur colère

et qui peut subsister ?

Vtenir ?  

7,1 Après cela, je vis quatre anges qui étaient debout aux quatre coins de la terre

ils retenaient les quatre vents de la terre

afin qu’aucun vent ne soufflât, ni sur la terre, ni sur la mer, ni sur aucun arbre.

7,2 Et je vis un autre ange qui montait du côté où le soleil se lève

tenant le sceau du Dieu vivant

et il cria d’une voix forte aux quatre anges à qui il avait été donné de nuire à la terre et à la mer 

7,3 disant :

— Ne faites point de mal à la terre, ni à la mer, ni aux arbres

jusqu’à ce que nous ayons marqué du sceau sur le front les serviteurs de notre Dieu.

7,4 Et j’entendis le nombre de ceux qui avaient été marqués du sceau :

cent quarante quatre mille

TR144 mille

de toutes les tribus des enfants

Vfils d’Israël

7,5 de la tribu de Juda, douze

TR12 mille marqués du sceau

de la tribu de Ruben, douze

TR12 mille

TRmarqués

de la tribu de Gad, douze

TR12 mille

TRmarqués

7,6 de la tribu d’Aser, douze mille

TR12 mille marqués

de la tribu de Nephthali

VNephtali, douze mille 

TR12 mille marqués

de la tribu de Manassé, douze mille 

TR12 mille marqués 

7,7 de la tribu de Simon, douze mille 

TR12 mille marqués

de la tribu de Lévi, douze mille

TR12 mille marqués

de la tribu d’Issachar, douze mille 

TR12 mille marqués

7,8 de la tribu de Zabulon, douze mille 

TR12 mille marqués

de la tribu de Joseph, douze mille 

TR12 mille marqués

de la tribu de Benjamin, douze mille

TR12 mille marqués du sceau.

7,9 Après cela, je vis une foule immense que personne ne pouvait compter

de toute nation, de toute tribu, de tout peuple et de toute langue.

Ils étaient debout devant le trône et devant l’Agneau

vêtus de robes blanches

et Byz S TR Nestenant des palmes à la main.

7,10 Et ils criaient d’une voix forte disant :

— Le salut est à notre Dieu qui est assis sur le trône et à l’Agneau !

7,11 Et tous les anges se tenaient autour du trône, des vieillards et des quatre animaux

et ils se prosternèrent sur leurs faces devant le trône

7,12 disant : — Amen !

La louange, la gloire, la sagesse, l’action de grâces

l’honneur, la puissance et la force soient à notre Dieu pour les siècles des siècles, amen !

7,13 Alors un des vieillards prenant la parole me dit :

— Ceux que tu vois revêtus de ces robes blanches, qui sont-ils et d’où sont-ils venus ? 

7,14 Je lui dis : — Mon Seigneur, tu le sais.

Et il

Byz S TR Neslui me dit : 

— Ce sont ceux qui viennent de la grande tribulation ;

ils ont lavé leurs robes et les ont blanchies dans le sang de l’Agneau.

7,15 C’est pour cela qu’ils sont devant le trône de Dieu

et le servent jour et nuit dans son sanctuaire.

Et celui qui est assis sur le trône les abritera sous sa tente.

7,16 Ils n’auront plus faim, ils n’auront plus soif

l’ardeur du soleil ne les accablera plus, ni aucune chaleur brûlante

7,17 car l’Agneau qui est au milieu du trône sera le pasteur

et les conduira aux sources des eaux de la vie

et Dieu essuiera toute larme de leurs yeux.

8,1 Et quand il eut

Vcomme il avait  ouvert le septième sceau

se fit un silence dans le ciel, d’environ une demi-heure... 

Réception

Liturgie

5,9s Tu nous as rachetés par ton sang - Introït

« Redemisti nos »

Traditionnel, Introït - Redemisti nos

Chœur des moines de l’abbaye Sainte-Madeleine du Barroux, (enregistrement en direct)

© Abbaye du Barroux→, Ap 5,9s Ps 89,2

Chant d'entrée pour la Messe de la fête du Précieux Sang.

1,6 ; 5,12 Digne est l'Agneau - Introït

« Dignus est Agnus »

Traditionnel, Introït - Dignus est Agnus

Chœur des moines de l’abbaye Sainte-Madeleine du Barroux

© Abbaye du Barroux→, Ap 1,6.5,12 Ps 71,2

Introït chanté pour la fête du Christ-Roi.

Arts visuels

5,1–14 un Agneau était debout : il semblait avoir été immolé Contemplation(s) de l'Agneau

12e s.

Beatus de Silos, Commentaire de l'Apocalypse (enluminure sur parchemin, 1109) 38 x 24 cm, Add MS 11695, f. 86v

abbaye Saint-Dominique de Silos (Espagne), British Library de Londres (Angleterre, Royaume-Uni) © Domaine public→

Anonyme, L'Agneau mystique (mosaïque, clipeus dans la voûte de la chapelle du Saint-Sacrement)

cathédrale Santa Maria Assunta, Torcello (Italie) © Domaine public→

Au zénith de la voûte de la chapelle, dans un cercle aux mosaïques chatoyantes où apparaît la couronne de la victoire, est représenté l’Agneau de laine blanche ; surmonté de la croix avec l’étendard de la résurrection dont il porte la hampe de la patte droite, et la tête nimbée d’une auréole crucifère. De son poitrail jaillissent huit jets de deux couleurs : de sang et d’eau.

Il y a là la représentation explicite de « l’Agneau égorgé » et vainqueur, tel que le célèbre le livre de l’Apocalypse (Ap 5,6-12), qui fait référence à plusieurs reprises au « juste » immolé décrit par Isaïe (Is 53,7). Grand prêtre et victime, le Christ sera l’ultime Agneau sacrifié : saint Jean (Jn 19,31) situe la mort de Jésus la veille de la Pâque juive, au moment où traditionnellement on immolait dans le Temple les agneaux pour le repas pascal en souvenir de l’exode. Dans le même évangile (Jn 1,29), prophétiquement, Jean-Baptiste désigne Jésus comme « l’Agneau de Dieu qui enlève le péché du monde », Celui que présente le prêtre à chaque Eucharistie.

L’agneau symbole du Christ ressuscité trône donc avec une juste majesté au sommet de la chapelle du Saint-Sacrement. « Notre pâque, le Christ, a été immolé » comme le proclame saint Paul (1Co 5,7). Saint Irénée ajoute : « Dieu sauva les fils d’Israël…à travers l’immolation d’un agneau sans tache… ». L'Église est le peuple nouveau sauvé par l’Agneau immolé… (Cf. Père J.-M. Nicolas).

17e s.

Le célèbre agneau de Zurbaran n'est pas représenté debout et victorieux, mais les pattes liées pour le sacrifice, prêt à être immolé :

Franscisco de Zurbarán (1598-1664), Agnus dei (huile sur toile, entre 1635 et 1640), 38 x 62 cm

salle 010A, inv. P07293, musée du Prado, Madrid (Espagne)  © Domaine public→, Lv 22,17-30 ; G—Is 53,7-8 ; Ac 8,32

Peintre espagnol du siècle d'or, Francisco de Zurbaran se distingue dans les peintures religieuses où son art révèle une grande force visuelle et un profond mysticisme. Il a réalisé six versions de ce sujet qui diffèrent peu les unes des autres. L'agneau est traité avec un grand réalisme, et la toile porte l'inscription : « Comme une brebis, il fut conduit à l’abattoir ; comme un agneau muet devant le tondeur, il n’ouvre pas la bouche. » (Ac 8,32). L'animal ne se débat pas et consent humblement à son sort. L'absence de décor et la surface occupée par l'agneau met chacun devant sa responsabilité : « Ce sont nos souffrances qu’il a portées, c'est de nos douleurs qu’il s’est chargé ; et nous l’avons considéré comme puni, frappé de Dieu, et humilié. Mais il était blessé pour nos péchés, brisé pour nos iniquités ; le châtiment qui nous donne la paix est tombé sur lui, et c’est par ses meurtrissures que nous sommes guéris. » (Is 53,4-5

5,5 lion de la tribu de Juda Le roi de la jungle

12es.

Le lion peut être un emblème ambigu (voir Ap 2,10) mais ses représentations médiévales ne parviennent pas toujours à en rendre la majesté...

Lambert (Lambertus de Sancto Audomaro, †1120), Liber floridus (p.122 : image du lion, incipit du chapitre sur le bestiaire ; tempera sur parchemin, scriptorium de Saint-Omer, abbaye Saint-Bertin)

Université de Gand (Belgique) © Domaine public→

6,1–8 un cheval blanc Farandole apocalyptique

Enluminure du 8e s. 

Beatus de Liébana (ca. 730-798), Commentaire sur l'Apocalypse (ca. 784), manuscrit, folio NP

Bibliothèque Nationale de France, Paris (France) © Domaine Public→

Jean figure quatre fois, à chaque fois pris par la main par un des « quatre animaux » (auxquels la Tradition fait correspondre les quatre évangélistes), qui semblent effectivement lui dire : « viens et vois  » et l'entraîner dans une ronde équestre ...

6,12–17 les étoiles du ciel tombèrent sur la terre Le 6e sceau : enluminé ou enjolivé ?

Enluminure du 8e s.

Beatus de Liébana (ca. 730-798), Commentaire sur l'Apocalypse (ca. 784), manuscrit, folio 116r

Bibliothèque Nationale de France, Paris (France) © Domaine Public→ 

C'est surtout l'ouverture du sixième sceau que l'on retrouve ici. L'ensemble est moins effrayant que dans le texte, avec une mention spéciale au beau ciel bleu roulé « comme un livre », à la lune plutôt changée en fleur qu'en « sang », au soleil plutôt éclipsé que devenu « noir comme un sac de crin » et aux étoiles qui forment comme un tapis de fleurs, elles qui sont dites tomber « comme le figuier projette ses figues non encore mûres lorsqu'il est secoué par le vent ».

6,12–16 ; 20,12–15 ; 22,7–10.18s comme un livre qu'on roule + le livre de la vie + ces choses ... Le livre plus solide que le monde L'apocalypticien compare volontiers le monde à un livre : →Apocalyptique (littérature —), 6.

Ici, il évoque la fragilité du cosmos ; à la fin du livre, qui coïncide avec celle du cosmos, tout laisse place à des livres (Ap 20,12-15) et le livre se termine comme il a commencé avec une insistante thématisation de l’écrit et livre eux-mêmes : Procédés littéraires Ap 6,12–16 ; 20,12–15 ; 22,7–10.18s

Si les savants ont peine à entrer dans le langage du cosmos, les artistes, eux, le connaissent bien. Plusieurs peintres ont été sensibles à cette inscription du livre et du paysage l’un dans l’autre. (Cf. Poussin, Arts visuels Ap 1,11 ; 12,1 ; 15,1 ; 19,13).

Sur cette petite peinture méconnue de Botticelli, par exemple, le livre que Jean est en train d’écrire et les rochers sur lesquels il s’appuie ne ressemblent-ils pas à des tomes sur une étagère dérangée ?

Sandro Botticelli (1445-1510), Saint Jean à Patmos (tempera sur panneau de bois, ca. 1490 -1492), 21 x 269 cm (prédelle entière), partie inférieure d'une prédelle

Galleria degli Uffizi, Florence (Italie) © Domaine public→

Et ne nous font-ils pas porter un regard nouveau sur les rochers volcaniques de Zouloufi, au nord de Patmos ?

Νικολίτσα Τσίτσικα, Zouloufi (photographie numérique, 2013), laves solidifiées

 Patmos (Grèce) © Domaine public→

7,1–8 tenant le sceau du Dieu vivant Signe cruciforme et intertexte

Enluminure du 8e s. 

Beatus de Liébana (ca. 730-798), Commentaire sur l'Apocalypse (ca 784), manuscrit, folio 119r

Bibliothèque Nationale de France, Paris (France) © Domaine Public→

Regardez bien le « sceau du Dieu vivant » (signum) que tient l'ange en-dessous du soleil : une croix ! Quel meilleur signe pour la signature, le cachet royal ? Ce n'est certes nulle part dans le texte : toutefois de fortes raisons intertextuelles et calligraphiques président à ce choix. En Ézéchiel, le signe dont il faut marquer au front ceux qui doivent être sauvés du fléau divin est littéralement, dans le texte hébreu, un tav, soit la lettre « t », dernière lettre de l'alphabet hébraïque, servant aussi à désigner l'indésignable (Sg 14,21) : Dieu (on retrouve ce procédé avec l'alpha et l'oméga grecs sous la plume de l'auteur de l'Apocalypse). Or son origine graphique phénicienne est en forme de croix... De là, le fléau et le signe salvateur d'Exode (Ex 12) sont également réinterprétés pour dessiner des croix avec le sang typologique du Christ. Et de là, le sceau de l'ange de l'Apocalypse ne peut être que cette croix du Christ, maintenant dévoilée...

7,9–17 une foule immense que personne ne pouvait compter Dessiner n'est pas compter

Enluminure du 8e s. 

Beatus de Liébana (ca. 730-798), Commentaire sur l'Apocalypse (ca. 784), manuscrit, folio NP

Bibliothèque Nationale de France, Paris (France) © Domaine Public→

Cette foule innombrable et bariolée (qui ne comprend ici néanmoins que des hommes) n'a pas ses regards tournés vers le trône et l'Agneau comme les autres personnages, mais vers nous. Comme pour nous dire qu'ils furent à notre place et que nous pouvons les rejoindre à la leur : dès lors, ils sont nombreux non pas pour qu'on les compte mais pour qu'on mesure que tous les lecteurs peuvent à leur tour grossir leur groupe.

Art contemporain

Hubert Dolinkiewicz (1998-), Męczennicy [Les Martyrs] (huile sur toile), 50 x 70 cm

© Dolinkiewicz→

La représentation est ici évocation, et à l'inverse de la précédente : l'on ne voit personne, aucun martyr, mais seulement un pan de ces robes blanchies « dans le sang de l'Agneau ». Ce sang est rappelé par l'encre rouge qui sort d'une des quatre plumes auréolées de lumière sur fond rouge sombre : les martyrs témoignent en effet, et leur sang versé, qui est témoignage, est une parole venant illuminer les ténèbres.

8,1s ; 9,1.13 ; 11,15 comme il avait ouvert le septième sceau 7e sceau et Fils unique

Enluminure du 14e s.

Un imagier médiéval en fait une interprétation magistrale, avec le Christ maître du sens en (septième) sceau du Livre et « chef d'orchestre » des anges trompettistes :

Anonyme, Les trompettes de l’Apocalypse (ca. 1301-1400), in L'Apocalypse de S. Jean, traduite en français (parchemin, anglo-normand), fol. 10v. détail, Ms-5214 réserve

Bibliothèque de l’Arsenal, Paris (France) © D.R. Gallica→

Musique

5,9 par ton sang Le sang de Jésus nous rachète personnellement

Musique contemporaine

« Le Fils de l'homme n'a pas d'endroit où reposer la tête » (Mt 8,20)

Anonyme et Gavin Bryars (1943-), Personne sans-domicile-fixe chantant un couplet bref, Jesus' Blood Never Failed Me Yet ["Le sang de Jésus ne m'a jamais manqué"], arrangement minimaliste, 1971, Queen Elisabeth Hall, 1972, 

Obscure (Brian Eno), The Sinking of The Titanic, [Merlin] IDOL Distribution, UMG (au nom de GB Records) © Licence YouTube standard

Paroles

Jesus' blood never failed me yet — Never failed me yet — Jesus' blood never failed me yet — This one thing I know for he loves me so.

Le sang de Jésus ne m'a jamais fait défaut, ne m'a jamais fait défaut. C'est la seule chose dont je sois certain, car il m'aime à ce point.

Composition

D'abord enregistrée lors d'un documentaire sur la vie de la rue à Elephant and Castle et Waterloo, à Londres, la mélodie de ce sans-abri inconnu retient l'attention de Bryars qui la trouve ajustée à son piano et réductible à 13 mesures. Des harmonies riches, composées de cordes et de cuivres, se superposent progressivement sur la boucle de cette brève strophe improvisée. pour le premier enregistrement, Bryars était limité à une durée de 25 minutes; plus tard, il créa une version de 60 minutes de la pièce en cassette ; puis de 74 mn pour CD. Plus de détails sur cette pièce très émouvante ici→

5,12s Digne est l'Agneau

18e s.

  • Johann Sebastian Bach, Das Lamm, das erwürget ist BWV 21 (1714)

Johann Sebastian Bach (1685-1750), Das Lamm, das erwürget ist BWV 21 (Cantate Ich hatte viel Bekümmernis mvt 11), 1714

© Licence YouTube standard→, Ap 5,12s, Ps 94,19, Ps 42(41), 5, Ps 116,7

Paroles
Das Lamm, das erwürget ist, ist würdig zu nehmen Kraft und Reichtum und Weisheit und Stärke und Ehre und Preis und Lob. Lob und Ehre und Preis und Gewalt sei unserm Gott von Ewigkeit zu Ewigkeit. Amen, Alleluja! (Ap 5,12-13)
Composition

Cette cantate religieuse (dont le titre se traduit par « J'avais grande affliction en mon cœur »), remarquable par le temps qu'y a consacré Bach et sa durée (45 min), met en scène le passage de l'expression endeuillée d'une profonde souffrance à la louange et à la confiance des pécheurs dans la grâce de Dieu. Les paroles bibliques sont particulièrement mises en valeur et exprimées sous forme de dialogues.

  • Georg Friederich Händel, The Messiah HWV56 - 'Worthy is the Lamb' (1741)

George Frideric Handel (1685-1759), The Messiah HWV56 - 'Worthy is the Lamb', 1741

Ivars Taurins (dir.), Karina Gauvin (soprano), Robin Blaze (contre ténor), Rufus Müller (ténor), Brett Polegato (bariton)

© Licence YouTube standard→, Ap 5,12s

Paroles

Worthy is the Lamb that was slain, and hath redeemed us to God by His blood, to receive power, and riches, and wisdom, and strength, and honour, and glory, and blessing. Blessing and honour, glory and power, be unto Him that sitteth upon the throne, and unto the Lamb, for ever and ever. Amen. (Ap 5,12-14)

Digne est l'Agneau qui fut tué et qui nous a rachetés auprès de Dieu par Son sang, de recevoir puissance, richesses, sagesse et force, et honneur, et gloire, et bénédiction. Bénédiction et honneur, gloire et puissance, soient à Celui qui siège sur le trône et à l'Agneau, dans les siècles des siècles. Amen.

Composition

Le Messie est une des œuvres les plus populaires de Händel. Elle est désormais considéré comme le chef-d'œuvre du genre oratorio. L'œuvre est écrite pour orchestre et chœur, avec cinq solistes (soprano, mezzo-soprano, contralto, ténor et basse); elle comprend une ouverture, une sinfonia pastorale et 51 récitatifs, airs et chœurs.

Cinéma

1,1–22,21 Allusions à l'Apocalypse

  • Ingmar Bergman, Det sjunde inseglet [« le septième sceau »] (1957).
  • Vincente Minnelli, The Four Horsemen of the Apocalypse (1961).
  • Andrei Tarkovski, Offret [« le sacrifice »] (1985).
  • Peter Jackson, The Lord of the Rings (en particulier le 3e film, 2003).